DES MATHÉMATIQUES. Part. V. Liv. III. 633
avons parlé page 63o , savoir que les corps peuvent, en vertu
de la vitesse acquise par une chute, remonter à la même hau
teur que celle d’où ils étoient tombés. Nous avons vu la réponse.
Lesanti Leibnitziens infirment encorele raisonnement de Leib
nitz de cette manière. En admettant avec Leibnitz que la force
est comme la somme des obstacles égaux qu’elle peut surmonter,
ils disent que le corps qui monte à une hauteur quadruple dans
un temps double, n’a à surmonter que le double du nombre
d’obstacles qu’éprouve le corps montant dans un temps simple à
une hauteur comme 1. En effet, il paroît que ce nombre de
coups, de chocs de la gravité qui produit l’accélération de la
chute est proportionel au temps, puisque les vitesses acquises
sont comme les temps, d’où l’on peut conclure qu’un corps
montant en deux temps à une hauteur quadruple, ne reçoit
de ces impulsions retardatrices que le double de celles qu’é
prouve le corps montant en un temps à une hauteur simple ;
de même qu’un corps tombant en deux temps d’une hauteur
quadruple, n’a reçu que le double de ces impulsions accéléra
trices de la gravité, comparé au corps qui, dans un temps 2,,
parcourt en descendant un espace i ; aussi le premier n’a-t-ü
en effet qu’une vitesse double.
Bernoulli lui-même, tout partisan qu’il devint dans la suite
des forces vives, ne pensoit point (i) comme Leibnitz que ce
fussent les hauteurs qui dussent mesurer les forces des corps
qui les avoient parcourues en montant $ parce que, disoit-il,
ces effets ne sont qu’accidentels, et une conséquence de la loi
actuelle de la gravité ; que si les lois de la pesanteur étoient autres
que celles qui ont lieu actuellement, les hauteurs ne seroient
nullement proportionnelles aux quarrés des vitesses. La raison
en est sensible. Les corps continueroient à se mouvoir à l’infini
en montant si une cause extérieure ne les empêchoitj celle pour
laquelle cette hauteur est finie se trouve dans l’action de la
gravité, action dont le mode est encore un mystère pour nous.
Il est donc impossible de déterminer la nature de l’obstacle, ou
des obstacles réitérés que le corps éprouve en montant, et qui
consument, pour ainsi dire , sa vitesse ascensionnelle.
Leibnitz sentit très-bien la justesse de la réponse de Bernoulli.
Aussi lui répliqua-t-il qu’il n’avoit allégué l’élévation d’un corps
que comme un des effets dans la production desquels la force se
consume, et qui par-là peut la mesurer. Ensuite reprenant son
argument et tâchant de lui donner plus de force , il lui fit remar
quer que tout l’art d’estimer une chose quelconque , ne consiste
qu’à réduire le tout à une seule mesure, dont la répétition seule
(i) Comm. Epist. Leib. et Bern. tom. I. epist. XI,
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