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PREFACE
Aussi convaincu qu’ il restait encore beaucoup à étudier et comprenant
par conséquent qu’ une synthèse historico-artistique sans de nouvelles et con
sciencieuses analyses ne pouvait aboutir qu’ à un résultat spécieux ou pour le
moins très risqué, je résolus avant tout de rechercher et de passer en revue
les différentes collections de documents concernant la période artistique dont
il s’ agissait de retracer l’histoire.
Mais peut-être mes travaux seraient-ils encore demeurés sans profit ou
lettre morte pour le public sans 1’ heureuse coïncidence de la mission que me
confia le Comm. Ongania ; il me chargea d’un travail qui, ayant pour titre
L’Architecture et la Sculpture de la Renaissance a Venise, devait servir
à 1’ histoire de l’Art vénitien qu’ il avait si admirablement inaugurée par la
grande monographie de la Basilique de Saint-Marc, monographie exécutée sous
la direction de l’illustre architecte et écrivain dont j’ ai placé le nom en têt A
de ces pages.
Pour remplir cette tâche, plusieurs années d’un travail assidu m’ étaient
nécessaires ; aussi, après avoir fait une ample moisson de nouveaux documents,
ne publiè-je qu’ aujourd’ hui seulement mon travail. Basé autant que possible
sur mes connaissances dans les différents Arts du dessin, il déroule au moins
en partie sous un plus véridique aspect cette brillante période quant aux do
cuments et aux comparaisons des caractères distinctifs, dont le goût spécial du
milieu et les nombreux maîtres qui florissaient alors à Venise, revêtirent nos
monuments.
Le caractère, les habitudes, le degré de culture et par conséquent le sen
timent artistique des Vénitiens influencés surtout par les réminiscences de l’O
rient avec lequel ils entretenaient des rapports continuels, et par cela même
différents des autres peuples de l’Italie, devaient, en se combinant avec les
conditions particulières de forme et la nature du sol, imprimer immanquable
ment au roi de tous les Arts, à 1’ architecture, une physionomie à part.
Aussi est-il vrai de dire que le style vénéto-byzantin, et même le style
ogival, après une période d’évolution beaucoup plus lente qu’ on ne le croit
généralement, déjà vers la moitié du XIV e siècle en harmonie avec le milieu,
atteignait pour nous la haute valeur d’une expression nationale.
L’Art ogival vénitien qui pouvait merveilleusement répondre aux exigen
ces statiques et artistiques, n’ était pas encore au commencement du XV e siè
cle passé à 1’ état d’Art stationnaire, et même relativement à la féconde variété
de ses applications décoratives, il devait être regardé spécialement comme pro
pre à rendre cette exubérante passion du luxe qui caractérise les mœurs vé
nitiennes, et comme influant au point de vue décoratif et pittoresque sur tous
nos autres Arts.
Tandis que, en Toscane, dans les premières années du XV e siècle, l’évolu