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PREMIERE PARTIE
Le sculpteur qui exécuta les amours ailés dans le décor de gauche (P. I,
pl. 27 et 28), qui rappellent un fragment antique, traita ces figures d’une ma
nière conventionnelle et comme pour obtenir uniquement 1’ effet décoratif. Mo
delées d’une façon plus large et plus pesante que sur 1’ autre bas-relief, les
têtes se rattachent très grossièrement aux épaules, les mains sont tout à fait
maniérées et plus d’une jambe éveille l’idée du rachitisme; toutefois les atta
ches des hanches avec les côtés sont assez bonnes. Quelque peu lourdes sont
encore certaines parties ornementales et dans le feuillage (légèrement de style
hybride) les nervures sont trop particularisées. Dans le bas l’étrange tête cou
ronnée, d’un âge non bien défini et qui a tout l’air d’un portrait, rappe
lant jusqu’ à un certain point la manière de Ferdinand i er d’Aragon, me trans
porte par la pensée à Naples où, dans les bordures du fameux arc triomphal
du Castel Nuovo, je trouve d’autres analogies avec cette tête, avec la pose de
ces amours et même avec les festons et leurs détails. Un signe caractéristique
des nouvelles tendances classiques se manifeste encore dans les deux petits
chapiteaux romains du fond.
Dans 1’ autre décor la composition de la bordure est plus serrée; toutefois
dans les amours on remarque une certaine exagération de mouvement qui dans
l’ouverture des membres inférieurs frise l’impossible; mais excepté ce défaut
et peut-être celui d’une certaine flaccidité dans les masses adipeuses, ces figures
sont modelées et particularisées avec grâce et avec soin et par leurs caractères
appartiennent nettement à la Renaissance; qu’on observe d’ailleurs à ce sujet la
finesse des plis du voile qui recouvre l’amour à l’angle supérieur de gauche.
Les anges et même les festons de ce contour ont de nombreuses analogies
avec ceux des doubles piédestaux de la porte de la Scuola de S. Marc (où
travaillèrent, comme compagnons, maître Pietro Lombardo, m.° Giovanni dit
Buora, dont je parlerai bientôt, et m.° Bartolomeo di Domenico ); ils ont surtout
des rapports avec ceux du tympan d’un arc infléchi d’un des portails de notre
Liste d’Espagne.
La différence entre les deux bas-reliefs s’accentue à mesure qu’on en
compare les détails; les proportions des têtes, les chevelures, la coupe des
yeux, l’incision des iris, la forme des lèvres, le contour des oreilles, les join
tures des extrémités, la forme et la longueur des doigts, le tracé des ongles
et jusqu’ à la manière de marquer le nombril ainsi que le type des ailes, diffè
rent absolument.
Différente aussi l’intelligence de 1’ emploi des plans, qui dans le second
bas-relief prend vraiment le type de la Renaissance.
Dans ce travail, les festons disposés, je 1’ ai dit, d’une manière plus gra
cieuse se nouent sur deux crânes d’animaux; la tête du cheval est un bon
morceau anatomique.