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PREMIERE PARTIE
peries des figures de femmes dans le groupe du Jugement de Salomon sur 1’ an
gle du Palais Ducal.
L’ action corrosive de la salure a non seulement enlevé aux plastiques
de ce monument une grande partie de leur éclat de dorures et couleurs ('),
mais empêche encore qu’ on puisse étudier la manière dont le modelage des
détails avait été compris à 1’ origine. Je ne parle pas des mutilations.
L’ opinion émise par Selvatico sur les bas-reliefs de ce monument ( 2 ) que
j’appelle sans périphrase une œuvre détestable et le fruit d’une Ecole alle
mande quattrocentiste, ne repose cependant que sur 1’ une de ces fausses per
ceptions artistiques dont fourmillent malheureusement ses écrits.
Burckhardt ( 3 ) qui semble y voir au contraire un travail de Bartolomeo
Bono (?) trouve que : » Les anges, entre les crabes, bien que d’un travail infé-
» rieur, rappellent 1’ ornementation semblable (?) de la Porta délia Carta; le
» grand relief du Baptême, malgré son état de mutilation, est une des compo-
» sitions les plus riches et du sentiment le plus profond qu’ il y ait dans le XV e
« siècle vénitien ». Et 1’ éloge de ce critique est encore répété par d’autres.
Mais la meilleure appréciation relative à 1’ auteur de ces travaux est, ce
semble, celle de Mayer ( 4 ). qui suivant en partie Bode a pu après une patiente
analyse de comparaisons établir que ces plastiques devaient être attribuées
directement à 1’ école florentine et au sculpteur du monument Brenzoni à San
Fermo Maggiore de Vérone (v. fig. 2j ).
Et en effet si 1’ on compare entre elles, comme il 1’ a fait, les composi
tions congénères de ces tombeaux, à savoir la Résurrection, on y découvre les
mêmes tendances au vérisme et au pittoresque, en particulier dans les figures
des gardes qui sont aussi traitées avec les mêmes formes et vêtus du même
costume.
Les figurines dans 1’ archivolte du monument des Frari et les anges du
dernier étage du bas-relief dans la lunette, par la forme arrondie des têtes,
par la disposition des cheveux, par la partie inférieure du visage peu saillante,
et par la coupe de la bouche, ont aussi des rapports dans le monument Bren
zoni avec les têtes des deux céroféraires.
Mais où les analogies deviennent surtout incontestablement évidentes, c’est
par la comparaison de 1’ ange qui dans ce monument soutient le couvercle du
tombeau, avec ses compagnons du Baptême du Christ sur le sarcophage du
Bienheureux Pacifique. Ces figures accusent le même âge, ont les mêmes phy
sionomies, la même disposition des chevelures, la tête ornée de la même façon,
et sont couvertes de vêtements même pliés d’une manière identique.
De cet ensemble de ressemblances il résulte que le nom du florentin
Giovanni Rosso dont est contresigné le monument Brenzoni peut vraisembla-
(i 2 3 4) Texte it., p. 77.