PÉRIODE DE TRANSITION
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qui le soulève et de 1’ insouciance du danger qui le menace, devrait au moins
par T anomalie de sa position exprimer tout autre chose que 1’ indifférence.
Quant aux draperies, dans les figures de femmes la distribution trop lar
gement accentuée et répétée des masses et 1’ épaisseur des étoffes contrastant
avec la finesse et avec un certain laisser aller vériste dans la disposition des
vêtements du Roi, est quelque peu lourde et monotone. Le bord ondulé des
manteaux des deux femmes rappelle, sous ce rapport, le bas-relief représentant
Scipion dans le chapiteau inférieur, les statues de Donatello et de Nanni di
Banco à Orsanmichele de Florence, et la Madone sculptée par ce dernier sur
la porte de la Mandorla ; mais dans notre groupe ce détail semble surtout avoir
été employé pour 1’ effet et pour déterminer les bords des vêtements.
Dans le Jugement de Salomon, l’armure du soldat rappelle par le cos
tume la fameuse statue de S. Georges de Donatello, les figurines angulaires
du monument Mocénigo, et spécialement les figures de soldats du tombeau
Brenzoni à S. Fermo Maggiore de Vérone, les congénères dans le même sujet
représentant la résurrection du Christ sur le devant du sarcophage renfermant
le corps du Bienheureux Pacifique aux Frari à Venise, et la statue de S. Mi
chel aujourd’ hui sur la porte du cloître du couvent de ce nom à Murano.
Nous n’ avons aucun document pour assigner avec certitude une paternité
artistique à notre groupe de Salomon, et, étant donné la diversité des caractè
res, je ne crois pas qu’ on puisse lui rapporter V inscription des deux socî in-
cisori du chapiteau inférieur, dont le genre et la manière, incontestablement, se
rattache aux sculptures désignées ci-dessus de la façade de la Basilique Mar-
ciane. Celles-ci, tant par les proportions des corps, que par les types et la
forme des têtes et des extrémités, diffèrent notablement des agiles figures de
ce groupe. Dans les vêtements des saints assis dans la bande frontale de l’ar
chivolte de Saint-Marc, les plis disposés en longues lignes courbes souvent à
festons et les nombreux revers ondulés parfois faiblement sur ceux de beau
coup d’autres figures, rappellent, comme je 1’ ai déjà dit, la statue de S. Marc
dans la Cathédrale de Florence et d’autres travaux sculptés par Niccolo Lam-
berti. Dans le Jugement de Salomon, au contraire, la figure du Roi est drapée
d’une manière tout à fait différente, et V on devine évidemment, que 1’ artiste
visait au naturel et par conséquent à s’ affranchir de toute vieille manière. Là
les plis tendent plutôt au fin et à 1’ anguleux, et sous le rapport du goût ont
certaines affinités avec les vêtements de 1’ ange qui soutient le couvercle de
l’urne dans le monument Brenzoni (v. fig. 23), et avec ceux des Anges dans la
scène du Baptême du Christ sur celui du Bienheureux Pacifique (v. P. 1, pl. 13
et pl. 24, fig. 1).
La même tendance à rompre le parallélisme des lignes apparaît dans les
plis des manteaux des deux mères, lesquels ont plusieurs analogies caractéris