50
PREMIÈRE PARTIE
visait à la recherche de la beauté en choisissant ses types parmi les trésors de
P antiquité, est certainement chose extrêmement ardue et périlleuse.
Quant au développement de la forme et au talent d’exécution, le mérite
assigné à certaines sculptures du XV e siècle n’ est grand que relativement à
1’ ambient artistique du temps. Là au contraire où P art de ce siècle se montre
parfois supérieur aux œuvres du commencement de la Renaissance (non tou
tefois au Palais Ducal), c’est dans la manifestation de certains sentiments, mais
avec le secours de naïfs artifices, restreinte le plus souvent à 1’ expression du
visage et souvent troublée par le choix vulgaire des types, par des ankylosés,
par une erreur d’interprétation anatomique, et par l’accentuation trop saillante
et puérile des détails. Ce sont des imperfections, que 1’ on pardonne aux tré-
centistes relativement au développement graduel de la forme, mais qui doivent
néanmoins être impartialement mises en relief par le critique d’art, qui veut
en conscience se rendre utile aux nombreuses recherches, si caractéristiques, de
notre temps.
Ainsi, par exemple, si c’est justice de reconnaître le grand mérite de Marco
Romano, qui exécutait en 1318 la statue du Bienheureux Siméon pour l’église
dédiée à Venise à ce prophète (statue dont la tête servit probablement de mo
dèle au sculpteur du groupe de Noé à 1’ angle Sud-Est du Palais Ducal), on
ne peut certainement pas 1’ appeler un chef-d’ œuvre si ce n’ est pour le temps,
car, relativement à la forme, elle pèche par 1’ ensemble, et ne pas tenir compte,
comme on 1’ a fait, des nombreux défauts de cette statue, quand on a voulu
déterminer le mérité de 1’ ouvrier dans la technique des détails, me semble un
oubli regrettable.
Heureusement on connaît désormais suffisamment les plus qu’ hétéroclites
appréciations sur les productions de la Renaissance, émises par Ruskin, artiste
et écrivain passionné, qui, tout en ayant le mérite d’avoir dessillé les yeux de
plusieurs, aurait certainement beaucoup mieux fait, et cela d’une manière plus
utile, de restreindre ses critiques aux périodes de 1’ art antérieures au XV e
siècle.
On ne connaît pas exactement la date où furent exécutées les sculptures de
la nouvelle aile du Palais; elles étaient très vraisemblablement déjà mises en place
en 1438, et certainement avant 1’ achèvement de la partie supérieure à la log
gia, c’ est-à-dire de la Sala novissima, qui était le nom donné d’abord à la
grande salle, dans laquelle on décida, le 2 Mars 1468, de réunir les précieux
manuscrits offerts par le Cardinal Bessarion et qui pour cette raison fut ap
pelée Salle de la Bibliothèque : nom qui par 1’ effectation qui lui fut donnée en
suite fut remplacé par celui qu’ elle porte encore aujourd’hui de Salle du Scrutin.
Plusieurs ont assigné la fin des travaux de construction à 1’ année 1463 ;
mais, pour moi, il ressort d’un document inédit que la Sala novissima était ache