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PREMIÈRE PARTIE
Quant au type, les escaliers intérieurs les plus en usage dans la première
moitié du XV e siècle se composaient d’une ou plusieurs branches adossées
d’un côté aux murailles et supportées par des arches à cintre aigu écrasé ou
encore à plein cintre, reposant, bien entendu, sur pilastres progressivement de
hauteur différente.
Toutefois l’escalier ne s’appuyait pas toujours, comme à la Cà d’Oro,
sur sa partie supérieure à la construction, formant au contraire parfois un
gracieux palier défendu dans 1’antestature, comme les branches, par des pa
rapets composés de colonnettes portant des arceaux trilobés et partagés par
de petits piliers, surmontés (comme les balcons des fenêtres) de groupes de
feuillages, de grappes, de lionceaux parfois tenant des écussons ; souvent aussi
ils se terminaient par des têtes humaines la plupart du temps aggroupées. Les
colonnes portant la toiture étaient en général de proportions sveltes, et sur
leurs chapiteaux était reproduit le système des soutiens à doubles consoles
de bois et architraves.
Il reste encore quelques escaliers de ce genre, sinon très commodes, cer
tainement très pittoresques, mais pour la plupart modifiés en raison de leur
vétusté ou de l’époque à laquelle ils ont été restaurés.
Parmi les plus intéressants je citerai ceux des deux Cours du Palais So-
ranzo (Van-Axel); le magnifique du Palais Bembo Rue Magno à S. Ternita;
celui du Palais Rizzo ou Maison Goldoni à S. Tomà; d’une maison sur le
Fondamenta dei Tolentini; du Palais Lorédan aux SS. Jean-et-Paul ; celui à
1’ extérieur des vieilles maisons des Molin à S. Fantino ; celui des Cappello à
S. Jean-de-Latran et l’autre de la même famille à S. Maria Mater Domini,
commencé après 1382, etc. ( 1 ).
Cette forme d’escaliers commença à tomber en désuétude vers la fin
du XV e siècle ; on adopta de nouveaux types et parfois même ceux en lima
çon tournant en tourelle ; mais nous parlerons de ces derniers dans la se
conde partie
Dans les riches habitations on n’employait pas toujours les escaliers de
pierre, mais on en faisait encore en bois. Malheureusement de ce genre de
constructions nous n’avons plus aujourd’hui à Venise qu’un seul modèle qui
remonte au XV e siècle ; modèle qui a été acheté par le Comm. Ferdinand
Ongania et cédé par lui au Musée Civique ( 2 ), après que je l’ai eu enlevé de
l’endroit où il était menacé d’un sphacèle imminent.
Cet objet précieux, qui se trouvait dans la vieille habitation appartenant
autrefois à la famile d’Agnella à S. Maria Mater Domini, se partage entrois
branches ou rameanx, dont le dernier, disposé trop à pic, conduisait à une
vaste mansarde. Chaque parapet se compose de bandes de planches emmor-
( 1 2 ) Texte 1t., p. 28,