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PREMIÈRE PARTIE
cité des formes, le palais du Doge Foscari (v. fig. 36), se distingue au con
traire par l’aspect majestueux et l’élégance équilibrée de ses masses.
Là où s’élève aujourd’hui ce palais, il existait au commencement du XVe
siecle un édifice plus bas et flanqué de tours, probablement de vieille construc
tion, mais certainement remarquable, puisque, en 1429 (*), la Seigneurie l’a
chetait aux Giustiniani pour le prix de 6500 ducats afin d’en faire présent au
Marquis de Mantoue. Ce dernier s’étant plus tard déclaré contre Venise, en 1438,
le palais lui fut enlevé et comme l’écrit Sanudo, le 23 Novembre 1439, fu
preso di donare al conte Francesco (Sforza) la casa che fu del Marchese di Man-
tova dalle due torri, posta a S. Pantaleone.
En 1447 le Gouvernement le confisqua de nouveau ; mis en vente il fut
acheté en 1451 par le Doge Foscari qui le reconstruisit ( 2 ) en en changeant
la position, c’ est-à-dire, comme le rapporte le généalogiste Girolamo Priuli,
dal loco dove hora e la corte al canton del Rio, sopra Canal Grande, che va a San
Pantalon, ove hora si vede lasciando il cortile di dietro, ove prima era essa casa. ( 3 ).
Au siècle dernier le Palais ou Cà Foscari fut agrandi sur la cour ; on
adossa à l’ancien presque un nouveau palais et on démolit encore l’ancien
escalier à ciel ouvert élevé au XV e siècle, escalier dont nous n’avons plus
qu’un léger souvenir dans les Singolarit'a di Venetia par Coronelli.
Dans la façade tournée vers le Grand Canal, l’étage inférieur manque
un peu d’air, et la porte sur l’eau, mal proportionnée, n’est même pas en
exacte correspondance avec les parties supérieures, défaut très fréquent dans
les constructions du temps.
La hauteur des autres étages varie ; le plus élevé est le piano nobile ou
du milieu et le plus bas celui du haut.
Les ouvertures des loges sont en nombre pair, si bien que la colonne
centrale de chaque étage détermine la ligne médiane de la façade. Le fenê
trage moins étendu du dernier étage, est un dédoublement des autres, lesquels
sont en bons rapports horizontaux avec la longueur de la façade et opposent
heureusement leur légèreté à l’importance des masses sur leurs côtés.
Là encore, et peut-être plus qu’ ailleurs (excepté pour la hauteur), l’idée
générale évidemment n’est qu’une dérivation des vieux édifices vénitiens.
L’ajour à quadrilobes de la loggia du milieu est pour le tracé sembla
ble à celui du Palais Ducal et a lui aussi les panaches entre les arcs, remplis
de têtes de lions et les miroirs ou triangles mixtilignes supérieurs de toute
sorte de fleurs.
Les entrelacs ajourés du dernier étage sont au point de vue du type égaux
à ceux de la loggia supérieure de la Cà d’Oro ; et en les comparant avec ceux
de l’étage inférieur du palais Foscari, on voit que, si les ajours à cercles qua-
(i 2 3) Texte lt., p. 30.