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PREMIÈRE PARTIE
avec la tête de la médaille de la Venetia Magna marquée AN [v. frontispice du
volume), et avec l’image de ce Doge sculptée sur son tombeau, que l’on peut
déduire que ces défauts sont de trop même pour la ressemblance.
Je retrouve la même manière d’interpréter le naturel et le portrait, en
plus d’un goût identique dans le choix et la forme des vêtements, avec ces
travaux et autres de Bono, dans le magnifique bas-relief du tympan de la
porte grandiose de la Scuola de Saint-Marc (aujourd’hui hôpital civil) re
construite après l’incendie de 1485 (v. fig. y y).
La vieille porte primitive fut confiée à Giovanni Bono en vertu d’un
contrat passé le 4 Août 1437 ( ! ).
A propos de ce bas-relief Sansovino rappelle que: « les figures placées
sur la porte dans le frontispice, et sauvées de l’incendie, furent sculptées par
le susdit Bartolomeo (qui fit le portail du palais ( 2 ) ».
Il n’est pas du reste improbable que ces figures, appliquées depuis sur
un fond de bardiglio, aient subi quelque retouche et particulièrement quelque
retaille en creux. De la même époque est encore la statuette de la Charité sur
le sommet de l’archivolte.
Aujourd’hui sur le Portail de la Carta à la place du groupe susdit est
un travail moderne qui, relativement à la forme et à l’interprétation des ma
nières des Bono, mérite plus d’une parole de blâme tant pour le sculpteur
que pour ceux qui auraient dû (sinon su) conseiller le sculpteur et diriger
l’exécution ( 3 ).
Parmi les diverses appréciations émises par les auteurs sur les vieilles
sculptures décoratives de ce Portail, je crois opportun de citer de préférence,
parce qu’elle s’appuie sur les meilleures raisons, celle que donne le Cicerone ( 4 ).
Bartolomeo Bono « occupe ici le même rang de transition que Niccolô
» d’Arezzo à Florence, et Quercia à Sienne. C’est précisément de la manière
» de ce dernier qu’il se rapproche le plus par ses quatre Vertus, ses Anges
» et ses Enfants. La Renaissance apparaît déjà dans la représentation de ces
» enfants nus, grimpant joyeusement parmi les crabes gothiques. Au nombre
» des Vertus, le Courage et la Tempérance sont de beaux motifs, très éloignés
» de la manière de Ghiberti, qui cependant, de même que les œuvres de ce
» maître, unissent la dignité du gothique à la liberté du nouveau style. La
» gravité, la beauté simple, sans les exagérations, mais aussi sans la puissance
» de Quercia, tels sont plus ou moins les caractères de ces figures de Barto-
» lomeo, surtout de la Justice trônant ».
A la pierre istrienne et au marbre statuaire, s’unit encore dans cette
Porte le rouge de Vérone avec lequel furent entièrement construites les élé
gantes mignardises polyédriques qui flanquent les piliers; et sur ces derniers,
G 2 3 4 ) Texte It., p. 40.