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SECONDE PARTIE
principale, et est celui qui renfermait à 1’ origine la fameuse pala peinte en
détrempe par le même Bellini, brûlée en 1867 avec le S. Pierre Martyr du Titien
dans l’incendie de la Chapelle du Rosaire; l’autre a été placé par l’autorité
dans l’Eglise de la Madonna dell’Orto et sert d’encadrement à un tableau de
Cima de Conegliano.
Il y a quelques années, j’ai eu également l’occasion de voir dans un dépôt
de marbres plusieurs fragments, eux aussi de pierre istrienne, qui certainement
avaient fait partie d’autres œuvres du même genre ; et je sus de bonne source
qu’un autel semblable (mais un peu moins grand) provenant de S. André de
la Chartreuse avait été en 1846, après réparation, vendu pour quelques florins
à un marchand étranger.
On peut donc conclure que ce type d’autels monumentaux commençait
déjà à être en vogue parmi nous vers la fin du XV e siècle, lorsque les peintres
voulurent réunir et grouper en grands tableaux ou compositions les divers per
sonnages religieux qu’on avait coutume, au contraire, d’après un vieil usage, de
disposer d’abord séparément dans les compartiments bien distincts des ancônes.
Des petits autels que l’on voit aujourd’hui à S. Giobbe sur les côtés du Pres
byterium, celui des Marin (H) fut érigé en 1502, l’autre des Corner (J) en 1586.
Cette Eglise fut consacrée solennellement le 14 Avril 1498 et la seconde
fois en l’année 1587.
Monument de Pietro Mocenigo (v. PI. 62). Le 4 Mars 1481, à la veille
d’élever l’Oratoire de Sainte-Marie-des-Miracles, les procurateurs de cette fa
brique passaient marché avec Maistro Piero Lombardo lequel a fait le tombeau de
m. Pietro Mocenigo Prince de Venise aux Ss. Jean et Paul». Indication provenant
de bonne source et qui correspond bien au passage suivant de Sansovmo :
« S. Jean et Paul. .. Pietro Mocénigo, 72 0 Doge, en l’année 1475, dans un très
« riche tombeau de pierre Istrienne avec 17 statues de marbre grandeur natu-
« relie, sculptées par Pietro Lombardo, et par Antonio, et Tullio ses fils, avec
« la statue pédestre sur le cercueil, avec ces mots sur le flanc EX HOSTIUM
» MANUBIIS et à juste titre, à cause de ses exploits sur mer » etc. (*).
Pietro Mocénigo mourut le 23 Février 1476, et par conséquent le travail
de ce riche monument dut être vivement conduit pour être terminé au bout
de cinq années seulement ( 2 ).
Moins important, soit en lui-même soit pour l’ordonnance architectonique,
que le monument Tron, dont l’influence manifeste du reste apparaît bien plus
dans l’ensemble allégorique, l’esprit et le mérite artistique de la composition,
dont le concept fut presque entièment consacré à glorifier les victoires et les
exploits militaires de Mocénigo. Sans l’agile statue du Sauveur qui se dresse
P 2 ) Teste It., p. 203.