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SECONDE PARTIE
tants 1’ allusion mythologique (à dire vrai ampoulée) des travaux d’Hercule
contre l’hydre et le lion, exprimée dans les bas-reliefs du stéréobate ; le premier
non pas très heureusement, le second mieux réussi (v. fig. 89), mais péchant
légèrement par le défaut d’expression anatomique des membres, relativement
au sujet qui devait rappeler l’idéal de la force en action. Défaut relatif et pro
venant de la tendance particulière au XV e siècle qui avait peine à sacrifier la
grâce et l’éléga*nce au profit de l’énergie musculaire des formes.
Les six statues de guerriers en costume romain disposées dans les maigres
niches des côtés, répondent bien au concept et au caractère de la composition
centrale ; toutefois la manière peu tranchée ou résolue dont elles se dressent
presque toutes et les allures assez peu dégagées dans le reste, donnent à ces
sculptures une valeur secondaire. Malgré cela, elles méritent d’être remarquées
pour la bonne facture des mains et des visages, dont quelques-uns rappellent
sans doute les traits de quelque héros ou empereur romain.
Plus remarquables, spécialement par les plis des vêtements, sont les deux
Saints (v. fig. 88) qui devaient autrefois si heureusement dominer, avec la majes
tueuse figure du Sauveur, le sommet du monumenf
A quel point ou dans quelle mesure, Antonio et Tullio Lombardo, déjà
passés maîtres sculpteurs en 1475, aidèrent-ils leur père, je ne saurais le dire
au juste; mais étant donné l’harmonie qui règne dans toutes les différentes
figures de ce chef-d’œuvre où dominent incontestablement les caractères de
Pietro Lombardo, il me semble qu’ ils n’ ont eu ici qu’ un rôle artistique
secondaire, à savoir dans 1’ ébauche des statues, dans l’achèvement de quelque
torse, de certaines têtes et extrémités et dans la facture des détails.
Leurs manières sont beaucoup plus évidentes dans les deux guerriers
porte-écusson de la façade du palais dit de l’Ambassadeur (v. Vol. I, page 32 et
fig. 42) ( l ), lesquels ont également une grande analogie avec les figures des
niches du tombeau de Pietro Mocénigo.
Là aussi la partie ornementale n’ est pas sans mérite; ainsi les trophées
de la base, les souples feuillages des pilastres, les décorations de l’archivolte
et des différentes frises et en particulier 1’ ornement avec mascaron dans le
frontispice de l’arcade choisi avec raison pour modèle dans beaucoup d’écoles
et qui a probablement été exécuté par 1’ un des fils de Pietro Lombardo, très
habiles dans les travaux de ce genre.
Les analogies des figures et des détails architectoniques que je rencontre
en comparant ce mausolée avec le monument du Doge Niccolô Marcello ( 2 ),
m’amènent à attribuer au même auteur cette œuvre très importante (v. Pl. 75).
Niccolô Marcello mourut en 1474 et eut pour successeur le Doge Pietro
Mocénigo ; il semblerait donc (et aussi pour son moins d’importance) que le
f 1 *) Texte It., p. 204.