LA RENAISSANCE.
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Peu différente par la composition est la frise du sur-ornement de l’entrée
de la chambre des Ecuyers au Palais des Doges (v. PI. 93 tig. 2), dont les élé
gantes consoles trouvent encore des sœurs dans une cheminée de l’habitation
des Montefeltro; et même les feuillages de cette frise, soit par la forme typique,
soit par la manière idéale dont ils ont été traités, sont évidemment le pro
duit d’une même famille artistique, c’est-à-dire du même groupe de sculpteurs
lombards, auxquels fut confiée une grande partie des travaux du vaste palais
d’Urbino, que Luciano de Laurana construisait pendant ce temps et menait
presque à terme. Là également, au commencement, travailla en qualité de maître
maçon un certain Giacomo di Giorgio de Corne, et se distingua jusqu’ au bout le
sculpteur lombard Ambrogio di Antonio, dit d’Urbino, déjà plusieurs fois cité.
Parmi les travaux de l’Eglise des Miracles qui se rapprochent le plus du
goût exquis et délicat des sculptures exécutées par ce maître à S. Michel de
Murano (v. PL 38, 63 et 66) et des travaux analogues de l’Eglise de S. Giobbe
(v. PI. 33 ixg. 2 et 3, Pl. 40 et 43) et du palais d’Urbino (v.fig. 34), je dois parti
culièrement citer les décorations courbées et très fines des pilastres de pierre
istrienne aux côtés de la porte principale (v. Pl. 26). Mais dans la frise et
dans les grands pilastres, dans les piédestaux de l’arc de triomphe et les
autres parties de la Chapelle et du palier aux côtés de 1’ escalier, les compo
sitions ornementales sont plus hardies et fantastiques et le marbre est traité
avec plus de largeur et de vivacité et avec une tout autre intelligence des effets.
Ces décorations en beaucoup de points répondent bien mieux aux cara
ctères des œuvres exécutées par les fils de Pîetro Lombardo, par exemple à
certaines riches cheminées de notre Palais Ducal (v. Pl. 94), aux gracieux
piédestaux en marbre de 1’ autel en bronze de la Chapelle Zen à Saint-Marc
(v.fig. 124), et à d’autres œuvres encore, qui, par déductions de comparaisons,
doivent être assignées à ces maîtres et parmi elles le monument Zanetti dans
le Dôme de Trévise (v. Pl. 79-80 fig. 2), le mausolée du Doge Andrea Vendramin
(v. Pl. 95) à Venise, la frise de la porte des Ecuyers dans notre Palais Ducal
(v. Pl. 93 fig. 2) et les travaux exécutés par l’illustre Antonio Lombardo pour
les Este (v. fig. 125 et* Pl. 8o bis ) (*).
C’est pourquoi je ne crois pas risquée l’hypothèse que Tullio et Antonio
Lombardo aient travaillé dans, ou pour, le palais de Frédéric de Montefeltro,
et dès le commencement sans doute avec leur père, peu après que celui-ci eut
achevé les principaux travaux de notre Eglise de S. Giobbe.
Il est facile de comprendre cependant que dans ces œuvres ils durent
avoir pour auxiliaires d’autres ciseaux et sans doute quelques maîtres de leur
pays et peut-être leurs parents, lesquels, nous l’avons dit ( 2 ). travaillèrent
aussi dans d’autres villes des Marches et où je suppose qu’ ils durent être
P 2 ) Texte It., p. 211.