LA RENAISSANCE.
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Dans le somptueux portail de la Scuola de S. Marc d’autres décorations
attirent l’attention et parmi les plus remarquables je citerai l’ornement à jour
qui sert si gracieusement de couronne à l’archivolte, la belle guirlande autour
du bas-relief, de Bartolomeo Bono vénitien, auquel appartient peut-être encore
la statue de la Charité sur le sommet du fronton ; guirlande étroitement iden
tique à celle de 1’ arc de trionphe de S. Marie-des-Miracles. Il faut aussi ad
mirer la jolie frise qui suit, courant tout le long de la façade, et qui, particu
lièrement dans le bout qui correspond au portail, rappelle le devant du Chœur
de S. Michel rappelé encore par les gracieux chapiteaux à bande sur les co
lonnes (v. PI. 138 fig. 1).
Nous ne pouvons oublier l’ornement à dauphins et vases de fruits autour
de l’arc de l’entrée, allusion complétée par le génie qui tient une corne d’a-
bondance dans la clef de voûte à console et dans lequel j’entrevois la manière
de Gian Giorgio Lascari dit Pirgotele.
Je retrouve encore un bon élément de comparaisons dans les décoratives
des pilastres médianes qui encadrent la baie, composées en guise de candéla
bres et qui se terminent par les symboles du pélican et du phénix. Ici la
partie ornementale, où l’artiste s’est passé encore le caprice de quelques for
mes bizarres qui annoncent le XVI e siècle (v. PI. 67 fig. 5), s’écarte beaucoup
du caractère des Lombardo. Elle a, par contre, de grandes analogies dans les
piédestaux du rez-de-chaussée, dans divers décors du Chœur de S. Michel,
dans la partie supérieure des pilastres de l’entrée de S. Zacharie, dans plu
sieurs détails de l’Église des Miracles et en particulier dans les riches et dé
licates bandes verticales du stylobaie du monument Suriano (v. PI. 76 fig. 1),
dont l’exécution fut donc probablement confiée en grande partie à Giovanni
Buora.
Dans la façade de la Scuola de S. Marc, l’instinct de Pietro Lombardo
de subordonner l’architecture à la décoration ne se borne pas seulement à la
faible saillie des masses soi-disant organiques et à l’indépendance de la par
tie statique ; mais ce sculpteur va encore plus loin et fait des éléments ar
chitectoniques comme des contours pour tableaux, ou amplifiant les fonds de
perspectives qui servent de scènes pittoresques aux histoires des petits bas-re
liefs, tant aimés des quattrocentistes, s’efforce de rendre 1’ édifice plus génial
et plus luxueux.
On ne désirait alors rien de mieux à Venise, rien par conséquent de plus
homogène avec le milieu.
Dans tous les cas pour ce qui est des perspectives de cette façade, grâce
à 1’ artifice des creux et au relief opposé des sculptures insérées, elles contri
buent jusqu’ à un certain point à donner une plus grande apparence de mou
vement à 1’ architecture, ne faisant plus aux yeux de 1’ observateur une illusion