LA RENAISSANCE.
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Architectoniquement le motif principal est fourni par les deux pieds-droits
latéraux, séparés par les corniches qui courent à travers le monument et rat
tachés en haut par une archivolte à lacunars ou caissons, et par le relief du
corps médiane dont la dernière corniche qui s’avance supportée par des mo-
dillons soutient la romanisante urne du Doge, artistement la partie la plus
caractéristique du monument. Le second ordre de ce corps a cependant l’air
un peu lourd et la répétition des compartiments horizontaux, des niches, et
de certaines formes, donne encore à cette œuvre un aspect d’ensemble un
peu froid. Il n’y a qu’un seul entablement: celui du haut complet avec gout
tière : les autres divisions avec juste raison ne sont au contraire formées que
que par les corniches. Dans quelques-unes de celles-ci, dans l’archivolte et
dans la cimaise du stéréobàte (dont le soubassement est peut-être surchargé
■de membrures) il faut observer que le listel inférieur à la gorge droite très en
saillie, est suivi d’un demi-rond, déterminant ainsi un profil de modénatures
manquant d’inflexion et par conséquent non très gracieusement combiné. Ce
type spécial d’ornement, dont je reparlerai plus loin, se retrouve encore dans
la corniche avec corbeaux sur la porte aveuglée du second ordre de l’Arco
Foscari dans le côté tourné vers la grande cour, dans le portail de l’Église
de S. Hélène (aujourd’hui S. Aponal), et on le voit avec moins d’élégance
encore employé pour la première fois dans la grande porte vers la terre
de l’Arsenal terminée au moins une vingtaine d’années avant le mausolée
Tron.
Dans ce monument la partie architectonique comme la partie ornemen
tale appartiennent au même degré à la libre Renaissance et il faut surtout
admirer les ornements verticaux si curieux pour la variété des compositions,
la manière ou le genre de sculpture.
Dans les feuillages, sur les lemnisques, dans les vases, le long de cer
taines modénatures, dans les ovules, à l’intérieur des niches et sur les autres
ornements et décorations, on discerne encore non seulement les traces des
vieilles dorures; mais la tendance extraordinaire des Vénitiens pour le luxe
et la couleur se révèle encore ici par l’emploi des marbres bigarrés et poly
chromes des miroirs du stéréobàte, par les différents champs ou carrés et par
les vestiges de peinture sur le fond de l’ample demi-lune supérieure.
Mais ce qu’ il y a de plus caractéristique dans cette œuvre, « est l’élé
ment statuaire tant pour le concept que pour la forme ». La naissance, la vie,
la mort, la résurrection sont ici rendues par les figures de l’Annonciation dans
le haut, par la statue du Doge debout dans l’arche inférieure, par celle du
mort couché sur le tombeau et plus haut par le Christ ressuscité. Cette der
nière allégorie n’est toutefois pas nouvelle dans les tombeaux comme le mon
trent, sans citer des œuvres d’une époque bien plus éloignée, le monument