LA RENAISSANCE. 287
dans laquelle, comme 1’ ont écrit Cavalcaselle et Crowe, se trouve résumée la
puissante imagination de ce merveilleux génie.
Les bronzes de l’autel Barbarigo furent, il est vrai, terminés en 1515 et
au contraire le tableau de l’Assomption ne fut commencé que dans les premiers
jours de 1516 et terminé seulement en Mars 1518 ( ! ) ; mais les analogies que
l’on découvre dans ces deux œuvres sont toutefois si faibles et même, étant
donné le même sujet et l’expression du même sentiment, elles paraissent sur
tout accidentelles et en tout cas si peu concluantes, qu’ elles ne diminuent cer
tainement pas le moins du monde le mérite du Titien.
P. Selvático qui, contrairement à Cicognara, admirait dans les douze
apôtres de ce bronze la grâce, la simplicité et la beauté des draperies, disait
que « certaines poses ont quelque chose d’affecté, que telle autre fait songer au
»mannequin revêtu sur compas d’amples draperies ( 2 ) ». Contre-critique non
absolument exacte, car, s’il est vrai qu’ on aperçoit ça et là un certain con
ventionnalisme de forme, il ne faut pas oublier d’un autre côté qu’ il y a dans
ces douze figures une telle vérité et finesse d’expression qu’on peut ranger ce
bas-relief parmi les meilleurs produits congénères de l’Art Vénitien.
Le regretté Natale Baldoria, à propos de l’Église de Sainte-Justine de
Padoue ( 3 ), émit timidement l’opinion que les bronzes du monument Barba
rigo étaient l’œuvre d’Alessandro Leopardi ; opinion que je partage pleine
ment parce qu’ elle me semble jusqu’ à un certain point confirmée par la com
paraison avec les allégories qui ornent les bases des trois mâts pour dra
peaux de la Place S. Marc. Allégories qui, traitées dans un but surtout déco
ratif, offrent néanmoins (dans la forme du nu des amours, dans les divisions
des plis, dans la même mesure de conventionnalisme et dans la manière de
modeler) des affinités avec les trois fragments de cet autel, où je retrouve éga
lement le procédé technique employé par Léopardi dans le corps des susdits
mâts, et qui consiste à rendre les surfaces rugueuses en les pointillant avec
l’extrémité de l’éclisse ou autre objet fin à section circulaire.
D’autres sculpteurs travaillèrent le bronze vers cette époque à Venise ( 4 ).
Ainsi Andrea Briosco dit Crispo, le fameux Auteur du grand candélabre de
la Tribune du Saint à Padoue (v. fig. 204 et 204) ; et non seulement cette œuvre
magnifique et les scènes qu’ il eut à exécuter dans le Chœur de ce Temple
(v. fig. 206 et 2oy)\ mais encore celles qui ornaient autrefois ( 5 ) le monument
qu’il avait fait pour la famille Dalla Torre (v. fig. 16) à S. Fermo Majeur de
Vérone, si on les compare avec ses autres travaux, ne permettent plus aujour
d’hui d’hésiter à lui attribuer les quatre petits tableaux de bronze représen
tant l’invention de la Croix (v. fig. 208, 209, 210 et 211) qui autrefois avec
les deux valves de défense, peut-être un peu antérieures mais du même auteur (v.
(1 2 3 4 5) Tex t e i ti> p . 270 et 271.