LA RENAISSANCE.
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1’ effort pour alléger les masses au risque de les rendre trop maigres ; ainsi
très faibles sont les rapports entre les chapiteaux et les grêles colonnes du
premier ordre, et mesquins sont les piédestaux cylindriques de 1’ attique sur
lesquels les statues extrêmes ont 1’ air de faire de 1’ équilibre. Maigres sont éga
lement en général les profils, et en particulier les corniches, excepté celle du
fronton qui par comparaison semble un peu lourde.
Bien appropriées et distribuées sont les diverses décoratives conduites en
outre avec une très grande habileté de dessin; mais une certaine mollesse uni
forme dans la manière de traiter les feuillages (qui rappellent beaucoup les
décors des piédestaux de la Chapelle du Saint à Padoue ) semble déjà indiquer
qne 1’ art de 1’ ornemaniste pour ainsi dire énervé est à son déclin.
La pose du protagoniste, couvert d’une armure et d’un manteau, manque
quelque peu de vie, et certainement le sculpteur n’ a pas su s’identifier avec
le caractère héroïque du personnage traité, si bien que, malgré la correction
du modelé, ce travail ne s’ élève pas au dessus de la médiocrité.
Quelle distance entre cette froide statue et l’imposante figure de Doge
sculptée environ vingt-cinq ans auparavant par Pietro Lombardo pour le mau
solée de Pietro Mocénigo !
Dans le monument Pesaro le nu de Mars, travail de Baccio da Monte-
lupo (*), tout en n’ étant pas une œuvre de premier ordre, mérite toutefois des
éloges tant pour les bonnes proportions et l’intelligence de la forme, que pour
la manière large dont il a été conduit.
La statue de Neptune, quoique un peu maniérée et moins remarquable,
révèle toutefois une certaine influence de 1’ art toscan et est peut-être l’œuvre
de Bregno.
Médiocre est la Madone avec l’Enfant dans le tympan, et c’est une chose
tout à fait mesquine que le dévot à genoux sculpté en bas-relief dans le rond
qui orne la face intérieure du jambage de gauche de 1’ entrée. Meilleure est
la demi-figure en face qui rappelle assez bien un élève des fils de Pietro
Lombardo.
Il y a dans cette Eglise un autre travail, que la partie statuaire et la
manière de représenter et d’interpréter le sujet, non moins que le maniérisme
de la forme, pourraient faire attribuer au même Bregno. C’ est le tombeau
du Capitaine Melchior Trevisan (f 1501), dont il faut sans doute plus
admirer la composition architectonique que les figures (v. fig. 13), et auquel
servent d’encadrement des décoratives à fresque pour la paternité desquelles,
parmi tous les peintres célèbres qui fourmillaient alors à Venise, on est allé
chercher le nom de Giacomo de’Barbari.
Les amours porte-écussons sculptés sur ce monument rappellent par la
(*) Texte It., p. 273.