SECONDE PARTIE
certaine époque appelée l’architecture du bas-relief. Et je constate cette in
fluence tant dans la profusion et dans V extraordinaire et capricieuse variété
des ornements, que dans la manière de faire concourir la statuaire à la déco
ration des édifices.
Cette architecture pittoresco-décorative, laquelle, je le répète encore,
n’était que l’expression du goût personnel des Vénitiens, fut favorisée d’une
façon toute particulière, je le crois du moins, par l’éclectisme de plusieurs de
nos grands maîtres, d’une imagination plus libre que celles de certains con
structeurs pour concevoir des choses nouvelles, pour faire des plans et donner
une vie et une tournure artistique au type des édifices en rapport avec les
mœurs du pays. Et parmi les maîtres les mieux doués de ces qualités figurent
en première ligne Giacomo et son fils Gentile Bellini, le premier surtout avec
ses dessins si intéressants. Puis nous avons une preuve de cette influence re
lativement à l’architecture, par rapport à Rizzo lui même, dans le fait suivant
que j’ ai mis en lumière : Le 21 juillet 1476 le Guardiano Grande et les membres
de la Confrérie de S. Marc passaient marché avec maistro Antonio ri\o taiapiera
pour la fourniture des matériaux et le travail d’un escalier en limaçon pensile
avec trois portes et un ambón ou chaire de marbre en forme de pentagone,
supporté par une console (jo^ola), qui toutefois devait être exécuté d’apres le
dessin fait par un maestro Gentile qui incontestablement ne peut être que Gen
tile Bellini peintre qui, déjà depuis plusieurs années, remplissait au sein de la
Confrérie des charges importantes, le seul artiste parmi les confrères qui
portât ce nom.
Cette chaire (pergolo) devait encore être historiée avec des figures en
demi-relief de marbre blanc disposées sur un fond de pierre noire et faites
suivant les indications du susdit Guardiano et des confrères. La dépense pré
vue pour ce travail, qui devait être au plus tard achevé à Noël de la même
année, était de 100 ducats dont 15 étaient versés sans retard à Rizzo à titre
d’acompte ou gage j 1 ). Je ne sais rien plus de cette œuvre, enveloppée cer
tainement dans l’incendie de 1485 qui détruisit la Scuola élevée depuis quel
ques années en cet endroit ; dans ce désastre furent encore englobés, parmi
tant d’autres trésors artistiques, les tableaux de Squarcione et de Giacomo Bel
lini, les deux initiateurs de notre Renaissance picturale.
Le monument Emo. Sansovino, à propos de l’Eglise de S. Marie des
Servites, écrivait ( 2 ). « Près de la sacristie, se trouve la statue pédestre en
» marbre sur un richissime tombeau, de Giovanni Emo, qui, après avoir rempli
» de nombreuses ambassades auprès des premiers Princes du monde, mou-
» rut (1483) à la tête de l’expédition de Ferrare ».
P 2 ) Texte It., p. 149.