92
SECONDE PARTIE
la confiance inspirée par Mauro Coducci comme architecte et constructeur,
fût plus grande, toujours est-il que la direction des travaux fut remise entre
ses mains et à partir du premier jour du même mois.
Il est difficile de fixer exactement la part qui revient à Moro dans ce
somptueux édifice ; mais en général je crois que, outre beaucoup de travaux
intérieurs, escaliers, ouvertures, pavages etc., outre la mise en œuvre d’une
foule de choses faites par Pietro Lombardo et ses compagnons, les revête
ments de marbre et les fenêtres de la façade principale, il apporta surtout
des modifications au plan primitif du couronnement de cette grande façade.
J’ ai été amené à cette dernière opinion par P examen des parties dont
se composent d’autres constructions élevées par Moro, tels que les frontons
de S. Michel et de S. Zacharie et le type d’autres détails architectoniques de
cette Eglise et préférés par lui. Ainsi les pilastres, les colonnades, les sup
ports jumeaux ou accouplés, les entablements des faibles architraves, les faîtes
avec arcs à caissons et gousses à larges cannelures et avec frises à ornements
fragmentaires et le genre de certaines décorations en marbre; tout cela jb le
retrouve même dans la partie qui s’élève sur la seconde corniche de la Scuola
de S. Marc et spécialement dans le bout qui correspond au corps principal.
Et je crois encore retrouver un goût décoratif identique dans les hautes fenê
tres avec frontons à arc baissé ornés de rocelles avec fèves à large frisure,
lesquelles ressemblenf à plusieurs grandes portes intérieures des pièces infé
rieures et de l’escalier, et où je ne pourrais certainement pas découvrir les
délicates manières de Pietro Lombardo et de Giovanni Buora.
Fenêtres et portes qui sont, je m’imagine, précisément celles que le maître
maçon Gregorio de Padoue n’avait pas encore mises en œuvre en Octobre 1495,
comme on le voit par la sentence rendue le 29 de ce mois à la suite du calcul
et de l’estimation des maîtres maçons Giorgio Grando et Pasqualino et le
susdit Giorgio Spavento (‘).
Parmi les travaux que, bien qu’ exécutés, maître Gregorio maçon n’ avait
pas cette année encore mis en place, il ne faut pas oublier la porte de l’Hô
tel, laquelle se distingue des précédentes par plus de simplicité, pureté de lignes
et certaine grâce des détails (v. fig. 59). Cette porte servit encore de modèle
en 1503 à maître Luca di Pietro de Cattaro pour l’entrée pratiquée symétri
quement vers l’autre bout de la grande salle ( 2 ).
De son côté T. Temanza remarquait que la « façade de l’Eglise de S. Za-
» charie dans les deux ordres supérieurs, et dans le fronton courbé, qui lui
» sert de couronnement est d’un caractère si conforme à la Scuola di
» S. Marco, qu’ il y a lieu de se demander si elle n’est pas son œuvre ». C’est-à-
» dire de Martino père de Moro, erreur à laquelle il a été entraîné par l’omis
( 1 2 ) Texte It., p. 175.