i86
SUR LA RÉSONNANCE
qu’on fait parler ces tuyaux-là ; et le son propagé qui en ré
sulte est souvent beaucoup plus intense que le son principal.
On peut tirer parti de ces propriétés pour augmenter l’effet
des orchesti'es dans les salles de spectacle, et cette précaution,
au rapport de J. J. Rousseau, n’est pas négligée dans les théâ
tres d’Italie. Le lieu où les musiciens sont placés est en quelque
façon lui-même un grand instrument. Le plancher est en com
munication, par le plus petit nombre de points possible, avec
la masse solide de l’édifice, qu’il serait trop difficile de faire
vibrer ; il la touche seulement par des bâtis légers, qui le tiennent
suspendu en l’air. Au-dessous de ce plancher, il y a une voûte
creuse, de même étendue horizontale , qui reste constamment
vide. L’air que cette cavité renferme est mis en vibration par
les instrumens de l’orchestre, et, comme un grand porte-voix,
renvoie leurs sons en les rendant plus forts et plus nombreux.
Comme il y a très-peu de distance entre chaque point d’où le
son se réfléchit dans la cavité , et celui dont il émane , il arrive
que les ondes réfléchies et les ondes directes parviennent aux au
diteurs à des instans si peu différens, qu’ils n’y aperçoivent point
d’intervalle sensible ; mais selon que la cavité résonnante est
plus ou moins profonde, et d’une forme plus ou moins bien
appropriée à la configuration de la salle, celle-ci en devient
plus ou moins sonore. Au reste, de tous les défauts qui peu
vent assourdir une salle de spectacle, ou en général un édifice
destiné à des assemblées publiques, le pire , et assurément un
des moins rares, c’est l’existence de grandes cavités pratiquées
mal à propos dans ses parois, et où les ondes sonores vont s’en
gouffrer sans pouvoir se distribuer au reste des auditeurs, si
ce n’est par des échos tardifs et incommodes , qui ne font
qu’affaiblir encore davantage les sons directs.
Il pai’aît que les anciens avaient, pour renforcer et ré
pandre les sons, des procédés qu’ils tenaient de l’expérience et
de la nécessité où ils étaient d’avoir recours à de semblables
ariifices pour faire entendre leurs acteurs dans des théâtres
immenses et entièrement découverts. Il y avait , dit-on , de
grands vases d’airain, placés dans diverses parties de l’enceinte,