188 MÉMOIRES SCIENTIFIQUES DE PAUL TANNERY.
mènes (par exemple le mot d’anges) ; mais la synonymie mysti
que, déjà complètement développée au temps de Nicomaque, a un
caractère exclusivement hellène. Il faut d’ailleurs remarquer que
la renaissance du pythagorisme a eu lieu non pas à Alexandrie,
mais bien à Rome, au premier siècle avant l’ère chrétienne; le
chef en est un certain Sextius (Sextus de Jamblique), qui mé
lange déjà sans doute aux éléments traditionnels de nouvelles
formules, mais les emprunte surtout aux stoïciens ; ses disciples
ont, comme lui, reçu la culture grecque, mais ce sont de purs
Romains ou des Occidentaux, comme Modératus, auquel se ratta
che immédiatement Nicomaque.
Jamblique admet que Sextus a recueilli directement (Wux <ha-
piv) la tradition pythagoricienne. Le fait est-il improbable?
Après Aristote, l’Ecole disparaît dans la Grèce propre, et elle ne
prend pas pied dans les Etats fondés par les successeurs d’Alexan
dre ; vers la même époque, la conquête romaine s’étend sur le
foyer originaire du pythagorisme, la Grande-Grèce, bientôt après
sur la Sicile, et rompt la plus grande partie des liens qui ratta
chaient ces pays à l’Hellade. La prétendue extinction complète
du pythagorisme dans la Grande-Grèce est une légende dont les
détails ne supportent pas l’examen. Est-il absurde de supposer
qu’il s’y soit perpétué obscurément pendant quatre ou cinq géné
rations sous la domination romaine, avant de former (la première
de toutes les sectes philosophiques grecques) parmi les nouveaux
maîtres des élèves qui lui donnent une nouvelle vie? On pourrait
placer dans cette période le nom de Megillos et aussi ceux de
Myonide et d’Euphranor, que nous rencontrerons plus loin.
Il convient de remarquer que, lorsque Nicomaque (II, i4) cite
des écrits théorétiques où l’on rencontre la mention de nombres
pyramides colures (sommes de polygones ne commençant pas à
l’unité), Asclépius et Philopon sont d’accord, sous des termes