SUR LA PUISSANCE MOTRICE DU FEU.
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trait autour de soi que des corps aussi chauds que nos foyers, comment
parviendrait-on à condenser la vapeur? où la placerait-on une fois
qu’elle aurait pris naissance ? Il ne faudrait pas croire que Гоп pût,
ainsi que cela se pratique dans certaines machines ('), la rejeter dans
l’atmosphère : l’atmosphère ne la recevrait pas. Elle ne la reçoit, dans
Г état actuel des choses, que parce qu’elle remplit pour elle l’office d’un
vaste condenseur, parce qu’elle se trouve a une température plus froide :
autrement elle en serait bientôt remplie, ou plutôt elle en serait d’avance
saturée ( 2 ).
Partout où il existe une différence de température, partout où il
peut y avoir rétablissement d’équilibre du calorique, il peut y avoir
aussi production de puissance motrice. La vapeur d’eau est un moyen
de réaliser cette puissance, mais elle n’est pas le seul : tous les corps
de la nature peuvent être employés à cet usage; tous sont susceptibles
de changements de volume, de contractions et de dilatations succes
sives par des alternatives de chaleur et de froid; tous sont capables de
vaincre, dans leurs changements de volume, certaines résistances, et de
développer ainsi la puissance motrice. Un corps solide, une barre métal
lique, par exemple, alternativement chauffée et refroidie, augmente et
diminue de longueur, et peut mouvoir des corps fixés à ses extrémités.
Un liquide alternativement chauffé et refroidi augmente et diminue
de volume et peut vaincre des obstacles plus ou moins grands opposés
à sa dilatation. Un fluide aériforme est susceptible de changements
( 1 ) Certaines machines à haute pression rejettent la vapeur dans l’atmosphère au lieu de
la condenser. On les emploie particulièrement dans les lieux où il serait difficile de se pro
curer un courant d’eau froide suffisant pour opérer la condensation.
( 2 ) L’existence de l’eau à l’état liquide, admise nécessairement ici, puisque sans elle les
machines à vapeur ne pourraient pas s’alimenter, suppose l’existence d’une pression capable
d’empêcher cette eau de se vaporiser, par conséquent d’une pression égale ou supérieure à la
tension de la vapeur, eu égard à la température. Si une pareille pression n’était pas exercée
par l’air atmosphérique, il s’élèverait à l’instant une quantité de vapeur d’eau suffisante pour
l’exercer sur elle-même, et il faudrait toujours surmonter cette pression, pour rejeter la va
peur des machines dans la nouvelle atmosphère. Or cela équivaudrait évidemment à surmon
ter la tension qui reste à la vapeur après sa condensation effectuée par les moyens ordi
naires.
Si une température très-élevée régnait à la surface de notre globe, comme il ne paraît pas
douteux qu’elle règne dans son intérieur, toutes les eaux de l’Océan existeraient en vapeur
dans l’atmosphère, et il ne s’en rencontrerait aucune portion à l’état liquide.