SUR LA PUISSANCE MOTRICE DU FEU.
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différence entre les températures des deux corps est infiniment petite,
sera facilement étendue au cas général. En effet, s’il s’agissait de faire
naître la puissance motrice par le transport du calorique du corps A
au corps Z, la température de ce dernier corps étant fort différente de
celle du premier, on imaginerait une suite de corps B, C, D,... de
températures intermédiaires entre celles des corps A, Z, et choisies
de manière que les différences de A à B, de B à C,... soient toutes infi
niment petites. Le calorique émané de A n’arriverait à Z qu’après
avoir passé par les corps B, C, D,..., et après avoir développé dans
chacun de ses transports le maximum de puissance motrice. Les opé
rations inverses seraient ici toutes possibles, et le raisonnement de la
page io deviendrait rigoureusement applicable.
D’après les notions établies jusqu a présent, on peut comparer avec
assez de justesse la puissance motrice de la chaleur à celle d’une chute
d’eau : toutes deux ont un maximum que l’on ne peut pas dépasser,
quelle que soit d’une part la machine employée à recevoir l’action de
l’eau, et quelle que soit de l’autre la substance employée à recevoir
l’action de la chaleur. La puissance motrice d’une chute d’eau dépend
de sa hauteur et de la quantité du liquide; la puissance motrice de la
chaleur dépend aussi de la quantité de calorique employé et de ce qu’on
pourrait nommer, de ce que nous appellerons en effet la hauteur de sa
chute (*), c’est-à-dire de la différence de température des corps entre
lesquels se fait l’échange du calorique. Dans la chute d’eau, la puis
sance motrice est rigoureusement proportionnelle à la différence de
niveau entre le réservoir supérieur et le réservoir inférieur. Dans la
chute du calorique, la puissance motrice augmente sans doute avec la
différence de température entre le corps chaud et le corps froid; mais
nous ignorons si elle est proportionnelle à celte différence. Nous igno
rons, par exemple, si la chute du calorique de 100 à 5o degrés fournit
plus ou moins de puissance motrice que la chute de ce même calorique
de 5o degrés à zéro. C’est une question que nous nous proposons
d’examiner plus tard.
Nous allons donner ici une seconde démonstration de la proposition
(') La matière ici traitée étant tout à fait nouvelle, nous sommes forcé d’employer des
expressions encore inusitées et qui n’ont peut-être pas toute la clarté désirable.