Full text: Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance

SUR SA.DI CARNOT. 76 
tant de cajoleries, devait suffire pour que désormais il n’attendît son 
avancement que de la longueur du temps. 
Survint en 1818 une ordonnance royale qui autorisait les officiers 
de toutes armes à se présenter aux examens du nouveau corps d’état- 
major. Sadi ne se dissimulait pas que la faveur jouerait dans ce corps 
un rôle beaucoup plus considérable que dans celui du génie. Mais il 
était fatigué de la vie de garnison; le séjour des petites forteresses, où 
le confinait la nature de son service, n’offrait pas des ressources suffi 
santes à son désir d’instruction; puis il espérait, et sa prévision se 
réalisa, qu’une demande de mise en disponibilité de sa part serait 
accueillie sans peine et lui assurerait les loisirs qu’il recherchait. 
Malgré les résistances bienveillantes de quelques chefs du corps du 
génie, témoignant un sincère regret de voir disparaître de leurs con 
trôles un nom qui y avait figuré avec honneur, Sadi vint à Paris subir 
les épreuves, et fut nommé lieutenant d’état-major le 20 janvier 1819. 
Il ne tarda pas à obtenir la disponibilité, et il en profita pour mener 
à Paris, et à la campagne près de Paris, une vie studieuse, interrompue 
une seule fois, en 1821, par un voyage en Allemagne, pour y visiter 
notre père dans son exil de Magdebourg. Nous eûmes alors le bonheur 
de passer quelques semaines tous trois ensemble. 
Quand la mort nous eut enlevé, deux ans plus tard, ce père vénéré, 
et que je rentrai seul en France, je trouvai Sadi rendu à ses études 
scientifiques, qu’il faisait alterner avec la culture des arts. Dans cette 
voie aussi, ses goûts lui avaient marqué une direction originale; car 
personne n’était plus ennemi que lui du traditionnel et du convention 
nel. On ne voyait sur son pupitre de musique que des compositions de 
Lully qu’il étudiait et des concerti de Yiotti qu’il exécutait. On ne 
voyait sur sa table que Pascal, Molière ou La Fontaine, et il savait 
presque par cœur ses livres favoris. Si je qualifie cette direction d’ori 
ginale, c’est parce qu’elle fut antérieure au mouvement artistique et 
littéraire qui précéda la révolution de i83o. Quant à la sympathie de 
Sadi pour l’auteur des Provinciales, elle était moins encore déterminée 
par le respect du jeune mathématicien pour un des maîtres de la Science 
que par une autre raison : son esprit, sérieusement religieux, avait en 
horreur l’hypocrisie et les faux dévots. 
Sensible au beau comme 'a Futile, Sadi fréquentait le musée du 
10.
	        
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