LA VIE DANS LES PHARES,
De la pointe du Raz aux bancs de la Gironde,
Écumeur éternel, partout l’0cean gronde, "d
Sur des milliers d'écueils multipliant son bruit. i
(Autant d'écueils, autant de souvenirs funébres.)
Cette voix de la mer, parlant seule aux ténèbres,
Est sinistre durant quatorze heures de nuit.
Et surtout quand on pense aux nombreux équipages
Qui, par les soirs d’hiver, poussés dans nos parages,
Reviennent fatigués d’un voyage au long cours.
Ils ont vu le cap Horn, ou les mers boréales,
Mais les cœurs sont restés sur les grèves natales,
Comptant les jours des mois, et les heures des jours.
Du golfe de Biscaye aux passes de la Manche,
Le-grand Océan sombre est dans sa fureur blanche,
Il ne reconnait pas les navires errants.
Ceux que nous attendons nous arrivent peut-être,
Et pas un astre au ciel ne daigne reparaître :
‘Tout le ciel est peuplé d’astres indifférents.
Mais de riches lueurs, vertes, rouges et bleues,
Apparaissent en mer jusqu’à neuf et dix lieues
Au marin dans la houle et dans la nuit perdu.
D'où vient-elle si tard, cette clarté bénie?
2st-ce un regard puissant-de quelque bon génie ?
Non. — Du bord de l’abime un homme a répondu.
Quand le ciel éteindra ses étoiles avares,
Pour éclairer l'espoir, l'homme a planté des phares
Sur les rocs, les écueils, la pointe des îlots ;
Dés que meurt le soleil, la cóte illuminée
Déploie avec lenteur une large trainée
De sa lumiére ardente à l'horizon des flots.
Si le ciel est peuplé d'étoiles inutiles,
A Noirmoutiers, Penmarch ; à Barfleur, aux Sept-lles ;