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FOURMILIERES ET FOURMIS. 237
neur tout à fait exceptionnel , dans-la série vi-
vante, de nous tourmenter nous-mêmes.
Il est vrai que si un Dieu avait voulu tracer
une fois pour toutes, pour les édiles de tous les
âges, l’éternel modèle des Babylones, nous n'au-
rions point étouffé pendant si longtemps au milieu
de rues tortueuses, dans des réduits obscurs, où
les architectes nous marchandent l’air, l’eau, la
lumière! La cité divine eût été parfaite pour ses
habitants comme la fourmilière l’est pour les
siens, dont aucun n’est un fauteur de troubles,
dont nul ne donnerait lieu à la moindre cen-
sure.
Quel misanthrope ne serait fier de nos imperfec-
tions et de nos erreurs, en face de la monotone
infaillibité de ces insectes, dont la raison semble
le chef-d’œuvre des forces universelles? Est-ce
qu’il ne verrait point, en face de cette vertu naive,
que ce sont nos défaillances qui nous donnent nos
sublimes élans? Ces chutes et ces bonnes fortunes
alternées font, en réalité, notre grandeur. Fus-
sions-nous mille fois plus petits que les fourmis ,
nous les dépasserions de toute la hauteur de notre
histoire ; non parce que nous sommes vertueux
comme elles, et malgré nous, d’une manière con-
stante, mais parce que nous le sommes un peu de
temps en temps, ayant la liberté d’être des scélé-
rats accomplis, faculté que certains de nos frères
ne se font pas défaut de montrer que notre espèce
possède en vérité tout entière.