168 L'ART NAVAL.
élevèrent un temple au fils d'Apollon. Ils décidèrent
en outre que le navire qui avait amené le dieu ne
servirait désormais à nul usage profane. Mais comme
il était simplement en bois, et qu’il menaçait de
pourrir, on tailla, dans le roc même de l'ile oü se
trouvait le temple d'Esculape, une galère toute sem-
blable, galère de pierre, comme on la nomma, et
sur laquelle se reporta aussitôt la vénération des
Romains pour le navire sauveur.
Cet exemple, comme un grand nombre de ceux
que nous a légués l’antiquité, n’a pas été compléte-
ment dédaigné par les nations modernes; et qui-
conque a visité certaines églises situées au bord de
la mer a pu voir, suspendues aux voûtes de ces tem-
ples, une quantité de petites embarcations offertes à
la sainte Vierge, par des marins en détresse, et qu’un
vœu a miraculeusement sauvés.
Mais un navire qui serait bien mieux encore de la
famille de ceux que nous venons de citer, n’est-il pas
ce chasse. marée qu'on voit figurer chaque année à la
fète du Coureau*? « Tous les ans, raconte M. Pacini?,
quand la saison de la pêche approche, plus de mille
bateaux se rassemblent pour l'inaugurer; alors les
pécheurs, dans leurs habits de féte, ornent leurs em-
! Le Coureau est le détroit qui sépare l'ile de Groix de Port-Louis;
ilest rempli d’écueils, et, par conséquent fort redouté des marins
qu’y attire forcément la pêche des sardines, laquelle est là plus
abondante que partout ailleurs sur nos côtes.
? La Marine, par E. Pacini.