LE FAISCEAU DES PLIS 147
Les humanités contrastent entre elles comme les pays. La Soummam
est kabyle. Le Chéliff participe déjà de la vie des Steppes. Orléans-
ville et Bougie sont des mondes différents. Le long de la ligne
Chéliff, plateau de Médéa, Soummam, aucune route n’a Jamais
passé à travers toute la série des siècles. A insister sur le lien de
direction qui unit ces deux vallées ne risque-t-on pas de voiler
leur dissemblance essentielle?
Ces exemples concrets suffisent peut-être à faire ressortir les
dangers de la méthode.
Pour éclairer la question avec une comparaison, rappelons
que, dans nos Alpes françaises, auxquelles nous raménent nos
habitudes d’esprit, quelle que soit l'importance des vallées trans-
versales, ce sont peut-être les accidents longitudinaux qui attirent
l'attention davantage. À tout le moins ce système de vallées lon-
gitudinales (Durance, Buech, Drac, Isère), qui court parallèle-
ment au Rhône à travers toute la chaîne, et qui l’articule, séparant
deux mondes, les 'Préalpes calcaires et les Alpes proprement dites,
avec leurs noyaux archéens. Instinctivement nous cherchons l’équi-
valent dans l’Atlas algérien et nous ne le trouvons pas.
Les Alpes et l'Atlas appartiennent au même Système de chaînes
périméditerranéennes. Mais elles semblent avoir chacune son
originalité.
Cet empilement ide nappes qui joue un si grand rôle dans les
Alpes paraît en jouer un beaucoup plus humble dans l'Atlas,
sous réserves de démonstrations qui n’ont pas encore été con-
vaincantes.
Il ne semble pas que rien dans les Alpes rappelle cette jux-
taposition en cases de damier de compartiments d'âge, de struc-
ture et de modèle différents, les uns pyrénéens par exemple et les
autres alpins. L'histoire de l’Atlas, telle qu’on l’entrevoit dans les
cartes paléogéographiques, est une histoire d’écroulements par-
tiels au fond de la mer, et de reconstitutions, de refontes, de résur-
rections par grands lambeaux. On a déjà vu, on verra encore dans
les chapitres suivants que l'Atlas est plein de retouches, de dis-
parates et de raccords. Mais les Alpes, au contraire, comme l'Atlas
saharien, ont bien l'air d’avoir été bâties d’un seul jet, sur un plan
général simple.
Quoi qu'il en soit, le temps pourra venir, après beaucoup de
monographies nouvelles, où il sera possible d’esquisser le dessin
général du plissement tellien. Mais on s’imagine que ce temps est