LES DÉSERTS SUCCESSIFS 67
L’évidence d’un climat quaternaire beaucoup plus humide que
l'actuel s'impose à l'attention en Algérie. Il faut être en garde
contre des conclusions -hâtives et incomplètes. En disant que le
climat désertique actuel a succédé à une ère pluvieuse on ne dit
rien que d’exact, mais on est extrêmement éloigné de rendre un
compte complet du passé connu. Le climat quaternaire lui-même,
en Algérie, diffère de l’actuel en degré, mais non pas en essence.
I ne s’est pas tout à fait dégagé des influences steppiennes. Pour
cette mise au point il faut rappeler quelques faits dûment établis.
L'expression « faune du Zambèze » a été choisie parce qu’elle
s'applique à une faune mixte, comprenant à côté d’espèces tropi-
cales comme l'éléphant, des bêtes steppiennes comme la girafe.
Le quaternaire algérien a des autruches et des chameaux.
Pour nous mettre en état d'imaginer ce climat quaternaire
le fait le plus net, tout à fait probant, est celui-ci. L'’oued Igharghar,
qui descend du Hoggar aboutit à la cuvette des grands chotts
sud-tunisiens. C’est là qu’il finit. D’une part aucune mer quater-
naire ou néogène n’a jamais pénétré dans cette cuvette, qui est
restée domaine continental au moins depuis la fin de l’éocène.
D'autre part cette cuvette est actuellement séparée de la mer par
le seuil de Gabès. Or on a établi après étude minutieuse qu’à
travers ce seuil, qui eût été la seule voie possible, la cuvette qua-
ternaire ne s’est jamais vidée dans la mer ‘. À propos de cette
région, partiellement située au-dessous du niveau de la mer, on
a rêvé de mer saharienne à créer industriellement:; la mission
Choisy y a fait des travaux topographiques de détail, prépara-
toires de projets éventuels. Ce pays qui excite l’imagination et
qui est à portée immédiate de la Tunisie a tenté d’autres travail-
leurs *. Il est tout à fait certain que l’Igharghar, même en son
plus beau temps, celui des silures et des crocodiles, n’a jamais
atteint la mer. Il se terminait entre Biskra et Gabès dans une
cuvette fermée. En ce temps, c'était apparemment l’affluent d’un
lac Tchad immense dont les chotts actuels sont un pauvre reliquat.
Autour de ce Tchad nous sommes à l’aise pour imaginer, comme
autour de l’autre, du véritable, une faune soudanaise et zambé-
zienne. Entre un Tchad et un chapelet de chotts il y a une immense
différence de degré, bien entendu, mais essentiellement l’un et
l’autre sont la même chose, la zone d'épandage d’un bassin fermé,
1: N°61 D. 70, 86 et 222,
2. N°0 83, p. 21 et suiv: