CHAPITRE II. — LA TOPOGRAPHIE DANS TOUS LES TEMPS. 4^1
partie terrestre. On en jugera immédiatement en se reportant
à la Carte de la Martinique (PI. IX).
Cependant, postérieurement aux travaux de la Commission
de 1802, deux pays étrangers seulement, la Suisse et le Pié
mont, adoptèrent la lumière oblique pour figurer le relief du
terrain. Peut-être n’est-il pas hors de propos de rappeler que
le général Dufour, qui fit entreprendre et dirigea la construction
de la belle Carte de la Suisse à l’échelle décimale de -¡-¡tóVító,
avait été français et élève de l’École Polytechnique d’où il était
sorti dans le Génie, et que l’un des plus célèbres ingénieurs-
géographes piémontais, Baggetti, avait aussi servi en France
pendant toute la durée de l’Empire ( 1 ).
En France même et malgré le talent de nos graveurs qui
avaient su admirablement interpréter les règles établies par
la Commission, au point que les savants étrangers venaient
souvent leur demander leur concours ( 2 ), malgré l’habitude
contractée à l’École Polytechnique et à l’École de Saint-Cyr,
sans parler du Dépôt de la Guerre où étaient préparées les
minutes des cartes gravées, une résistance inattendue et assez
inexplicable se manifestait à l’École d’application de Metz où
l’on avait donné la préférence à la lumière verticale. Le pré
texte mis en avant était « le peu de succès que les élèves
(') Baggetti avait un admirable talent d’aquarelliste; en l’appelant en
France avec le grade de capitaine ingénieur-géographe, Napoléon l'avait
chargé d’exécuter des vues de champs de bataille et des lieux célèbres
parcourus par l’armce française, particulièrement en Italie. Le nombre des
œuvres de Baggetti est considérable. On en peut voir au Musée de Ver
sailles, dans les salles numérotées 146; le Dépôt de la Guerre seul possède
176 merveilleuses aquarelles presque toutes de cet habile paysagiste. Plus
de 60 ont été gravées et se trouvent à la Bibliothèque Nationale, sous le
titre de : Vues des campagnes d’Italie en 1796 et 1800, peintes par Bag
getti, accompagnées d’une Carte à vol d’oiseau de la Suisse pour suivre
la marche de l’armée française pendant la campagne de Marengo. Il y
avait là un retour à la tradition des peintres militaires du grand règne qui
ne s'est jamais perdue dans notre pays et qui a même été ravivée par
l’idée du roi Louis-Philippe, critiquable si l’on veut sous d’autres rapports,
de consacrer le palais de Versailles aux gloires de la France. Cependant,
à part Baggetti, Bacler-Dalbe et quelques autres, on peut regretter que les
peintres de batailles ne soient pas toujours restés en relations avec le Ser
vice topographique de l’armée.
( J ) C’est ainsi que Léopold de Buch avait fait graver une belle Carte bien
connue de l'ile de Ténérilfe, par Pierre Tardieu, et l’on pourrait citer un
grand nombre d’autres exemples et de noms de graveurs distingués.