LIEUX GÉOMÉTRIQUES. ÉTUDE DES COURUES
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traçant que des lignes droites et des cercles ; au lieu que les autres
ne le peuvent être qu'on n’y emploie pour le moins quelque section
conique ; ni enfin les autres qu’on n’y emploie quelque autre ligne
plus composée. Mais je m’étonne de ce qu’ils n’ont point, outre
cela, distingué divers degrés entre ces lignes plus composées (*), et
je ne saurais comprendre pourquoi ils les ont nommées mécaniques
plutôt que géométriques. Car de dire que ç’ait été à cause qu’il
est besoin de se servir de quelque machine pour les décrire, il fau
drait rejeter par même raison les cercles et les lignes droites, vu
qu’on ne les décrit sur le papier qu’avec un compas et une règle,
qu’on peut aussi nommer des machines. Ce n’est pas non plus à
cause que les instruments qui servent à les tracer, étant plus com
posés que la règle et le compas, ne peuvent être si justes; car il
faudrait pour cette raison les rejeter des mécaniques, où la justesse
des ouvrages qui sortent de la main est désirée, plutôt que de la
Géométrie, où c’est seulement la justesse du raisonnement qu’on
recherche, et qui peut sans doute être aussi parfaite touchant ces
lignes que touchant les autres. Je ne dirai pas aussi que ce soit à
cause qu’ils n’ont pas voulu augmenter le nombre de leurs
demandes, et qu’ils se sont contentés qu’on leur accordât qu’ils
pussent joindre deux points donnés par une ligne droite et décrire
un cercle, d’un centre donné, qui passât par un point donné : car
ils n’ont point fait de scrupule de supposer outre cela, pour traiter
des sections coniques, qu’on pût couper tout cône donné par un
plan donné. Et il n’est point besoin de rien supposer, pour tracer
toutes les lignes courbes que je prétends ici introduire, sinon que
deux ou plusieurs lignes puissent être mues l’une par l’autre, et
que leurs intersections en marquent d’autres Mais peut-être que
ce qui a empêché les anciens géomètres de recevoir celles [les
lignes] qui étaient plus composées que les sections coniques, c’est
que les premières qu’ils ont considérées ayant par hasard été la
spirale, la quadratrice et semblables, qui n’appartiennent vérita
blement qu'aux mécaniques et ne sont pas du nombre de celles que
j. pense devoir ici être reçues, à cause qu’on les imagine décrites
par deux mouvements séparés et qui n’ont entre eux aucun rap
(*) Plus composées : c’est-à-dire d’un degré plus élevé, voir Deux, livr.,
ch. iv.