REPRÉSENTATION GÉOMÉTRIQUE, ETC.
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des grandeurs en général à l’espèce de grandeur qui se représentera
le plus facilement et le plus distinctement dans notre imagination.
Or celte grandeur est 1 étendue réelle d’un corps, abstraite de toute
autre chose que ce qui a figure ».
Ainsi, étant obligée d’habiller la quantité pour avoir prise sur
elle, notre imagination lui donnera le vêtement de la grandeur
géométrique. Suivant la même fiction, elle se représentera les cal
culs algébriques comme des calculs eilectués sur les grandeurs.
Une expression algébrique, c’est le résultat d’une construction
géométrique obtenue en parlant de figures connues. Une identité,
c’est la constatation de ce fait que deux constructions différentes
conduisent au même résultat à la même figure). Une équation,
c’est la condition qui détermine une grandeur inconnue dans une
figure connue. El ainsi de suite.
En interprétant ainsi l’algèbre par le calcul des grandeurs, nous
ne faisons, en somme, que revenir an point de vue des anciens.
Nous avons vu que, pour les Grecs, tout raisonnement ou calcul
mathématique qui n’a pas pour objet des nombres entiers, ou ra
tionnels, porte sur des grandeurs géométriques. INous avons vu f 1 ) (*)
(*) Nous avons déjà fait observer qu’au xvn e siècle il n’était pas encore
possible de donner du nombre irrationnel une définition arithmétique
rigoureuse. Il semblait donc que, pour élever la logistique au rang de
science théorique il fallût en rattacher les principes à ceux de la science
modèle, la géométrie classique. Ainsi ce n’est point par hasard que les
assises définitives de l’édifice algébrique furent posées par des savants
qui avaient fait une étude approfondie des mathématiques grecques. (Cf.
n os 532 et suiv.). Il ne faudrait pas toutefois exagérer la portée de cette
remarque, comme on l’a fait quelquefois. L’appel à la figure pouvait fort
bien être évité si l’on renonçait à « définir » le nombre (ou bien si l’on
en donnait, comme Wolf, une définition purement verbale destinée sim
plement à signaler l’entrée en scène d’une notion nouvelle, cf. p. n3,
note t), et si l’on posait a priori les règles des opérations comme autant
de définitions, sans chercher à les justifier. C’est ainsi que nous avons
procédé nous-mêmes dans cet ouvrage, et, si nous avons dû observer cer
taines précautions (cf. n° 279) auxquelles les premiers algébristes ne pre
naient pas assez garde, nous n’avpns fait- cependant que perfectionner un
mode d’exposition qui est aussi ancien que l’algèbre et qui fut couram
ment employé par les cartésien ) cf. le Calcul de Monsieur Descartes,
précis d’algèbre rédigé par Descartes pour servir d’introduction à
sa Géométrie [vide supra, n° 270; et aussi les traités publiés par les
commentateurs de Descartes dans l’édition latine de la Géométrie]. Si donc
l’algèbre reste géométrique chez la plupart des auteurs des xvn e et