LXXIÏ. - 24 AOUT 1654.
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l’hypothèse qu’il manque deux parties à l’un et trois à l’autre, con
viennent maintenant de gré à gré qu’on joue quatre parties complètes,
c’est-à-dire qu’on jette les quatre dés à deux faces tous à la fois, n’est-
il pas vrai, dis-je, que, s’ils ont délibéré de jouer les quatre parties,
le parti doit être, tel que nous avons dit, suivant la multitude des as
siettes favorables à chacun?
Il en demeura d’accord et cela en effet est démonstratif; mais il
nioit que la même chose subsistât en ne s’astreignant pas à jouer les
quatre parties. Je lui dis donc ainsi :
N’est-il pas clair que les mêmes joueurs, n’étant pas astreints à
jouer «< les > quatre parties, mais voulant quitter le jeu dès que l’un
auroit atteint son nombre, peuvent sans dommage ni avantage s’as
treindre à jouer les quatre parties entières et que cette convention ne
change en aucune manière leur condition? Car, si le premier gagne
les deux premières parties de quatre et qu’ainsi il ait gagné, refusera-
t-il de jouer encore deux parties, vu que, s’il les gagne, il n’a pas
mieux gagné, et s’il les perd, il n’a pas moins gagné? car ces deux que
l’autre a gagné ne lui suffisent pas, puisqu’il lui en faut trois, et ainsi
il n’y a pas assez de quatre parties pour faire qu’ils puissent tous deux
atteindre le nombre qui leur manque.
Certainement il est aisé de considérer qu’il est absolument égal et
indifférent à l’un et à l’autre de jouer en la condition naturelle à leur
jeu, qui est de finir dès qu’un aura son compte, ou de jouer les quatre
parties entières : donc, puisque ces deux conditions sont égales et in
différentes, le parti doit être tout pareil en l’une et en l’autre. Or, il
est juste quand ils sont obligés de jouer quatre parties, comme je l’ai
montré : donc il est juste aussi en l’autre cas.
Voilà comment je le démontrai et, si vous y prenez garde, cette dé
monstration est fondée sur l’égalité des deux conditions, vraie et
feinte, à l’égard de deux joueurs, et qu’en l’une et en l’autre un même
gagnera toujours et, si l’un gagne ou perd en l’une, il gagnera ou
perdra en l’autre et jamais deux n’auront leur compte.
4. Suivons la même pointe pour trois joueurs et posons qu’il manque