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PREMIÈRE PARTIE
figure du Saint assis au milieu, on dirait que ces statues appartiennent sur
tout au commencement du XV e siècle.
Par les figures de la grande porte et par le bas-relief de la Chapelle
Cornaro il est avéré que l’art statuaire était notablement en progrès ; mais
dans les œuvres de ce tombeau, plus que stationnaire, il semble en décadence
et réduit au métier de modeler et appliquer des têtes sur des paquets presque
informes de vieux habits exécutés dans l’atelier de quelque sculpteur doctrinal.
Atelier qui avait sans doute le crédit d’un grand nom et du bon marché.
Je remarque d’ailleurs parmi ces sculptures la statue de S. Jean-Baptiste,
semblable par l’attitude et la physionomie au même Saint dans le susdit
bas-relief sur la Place S. Zacharie, et les deux anges dans les riches modil-
lons de l’arche, parcequ’ils rappellent de loin par leurs chevelures les anges
du susdit bas-relief de la Chapelle Cornaro.
D’une inscription déplacée voisine de ce monument (à la construction
duquel on songeait dès 1434), il ressort qu’ il fut mis en place en 1464.
Ici je demande pardon au lecteur d’ouvrir une longue parenthèse ; avant
de dire quelque chose de l’autel de cette Chapelle, je crois utile de donner
une idée d’autres œuvres vénitiennes congénères du XV e siècle soit antérieures,
soit contemporaines.
Relativement à la forme des autels dans lesquels l’architecture demeure
subordonnée à la décoration, Burckhardt écrit qu’à l’époque de l’architecture
dite Gothique : « Dans la haute Italie (mais non dans les autres provinces ita-
» liennes), le tabernacle d’autel isolé, à quatre faces, cède déjà la place çà et
» là à l’autel du Nord, c’est-à-dire une paroi avec simple, double ou triple
» rangée de niches pour statuettes (généralement en bois), avec des pyramides
» ciselées pour couronnement, le tout peint et doré » (*).
A Venise beaucoup d’autels érigés au XV e siècle furent refaits aux XVII e
et XVIII e , et d’autres en grand nombre furent enveloppés dans les démoli
tions du vandalisme qui inaugura les premières années du siècle actuel. Si à
ces causes on ajoute encore les ventes continues et les trafics illicites qu’on
a fait et que V on fait encore de fragments antiques, on comprendra sans peine
qu’il reste aujourd’hui peu de chose pour appeler sur ce point l’attention de
l’artiste et de l’écrivain.
Je parlerai plus loin des ancones ou des autels en bois; en attendant
j’en citerai plusieurs des plus caractéristiques exécutés en marbre ou en pierre.
La plus remarquable de ces œuvres (Partie I, PI. 6. fig. 1) est à Saint-Marc
dans la Chapelle ordinairement appelée délia Madonna dei Mascoli, mais qui
s’appelait à l’origine Cappella nuova; laquelle, d’après l’inscription gravée
au fond sur la pierre, fut construite en 1430.
O Texte It., p. 51.