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PREMIÈRE PARTIE
on peut voir une partie et sur le tableau de Gentile Bellini représentant la
procession de la confrérie de saint Jean l’Evangéliste, et sur l’estampe de
Venise vue à vol d’oiseau gravée sur bois par Giacomo dei Barbari, excepté
toutefois la nouvelle tour de l’Horloge. Ces constructions furent rasées au
commencement du XVI e siècle et sur leur emplacement on éleva celles qu’ on
appelle aujourd’hui Procuratie vecchie; dernièrement, en renouvelant le pavé
de la Place, on a trouvé, dans leurs fondations, des fragments importants de la
fin du XII e siècle, restes très probablement des susdites démolitions.
Or, rien de tout cela, ou pour mieux dire c’est tout l’opposé, ne se trouve
au contraire dans la loggia du Palais Ducal, dont on ne peut même pas
admettre les détails comme contemporains des divers travaux congénères
exécutés dans cet édifice au XIV e siècle. Et le moyen de comparer les uns avec
les autres est tellement facile qu’on s’étonne que leurs dissemblances n’aient
frappé en aucune façon ceux qui ont voulu en écrire.
Étant donné le type et les rapports entre la hauteur des soutiens et
l’amplitude de son développement; étant donné encore la variété et l’état de
conservation des matériaux qui composent cette loggia, elle ne peut pas même
être antérieure au XV e siècle, et elle est évidemment destinée avant tout au
rôle de construction secondaire interne.
Ses chapiteaux (v. fig. j) par leurs larges développements angulaires, par
le mouvement dans les extrémités des feuillages, par la manière dont ils se
détachent, par leur nature ou la forme caractéristique de sculpture de leurs
bords, ont au contraire des rapports avec ceux des soutiens polystyles de la
loggia, dans le même bras donnant sur la cour; avec plusieurs de ceux de
l’allée de la Porte délia Carta; avec plusieurs de la Cà d’Oro; avec ceux du
portique de la Scuola de la Charité (v. fig. 6J; avec plusieurs de la Cà Foscari
et des palais Giustiniani et tant d’autres édifices indubitablement exécutés au
XV e siècle (»).
Quant aux parties en bois, je dirai, que non seulement les corniches qui
en haut et aux têtes contournent le plates-bandes de bois ou les poutres co
lossales sans interruption, mais encore celles qu’ on voit se développer à l’in
térieur des chambres, ont la forme et les détails ornementaux absolument
typiques de la première moitié du XV e siècle. Dans les modillons ou doubles
chiens de bois, au contraire, les petites bandes à découpures n’ ont rien d’ana
logue aux supports congénères des temps antérieurs et décèlent déjà une ten
dance ou plutôt une disposition aux formes de la Renaissance.
Puis le fait que sous le Doge Foscari étaient continués le portique et la
loggia de la neuvième colonne inférieure à partir de l’angle sud-ouest et en
allant vers Saint-Marc, n’est pas, comme le veulent quelques-uns, incompatible
(‘) Texte It., p. 7.