LA RENAISSANCE
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autre chose que des réminiscences d’anciens fragments et que l’intention d’a
nimer le plus agréablement possible la décoration qui d’une certaine façon
sert de paysage à cette heureuse scène du Paradis Terrestre.
En continuant le tour du pilastre je rencontre sur l’autre face des détails
qui, si non par la forme du moins par la disposition homologue, rappellent
très bien le côté tourné vers l’entrée. Dans le haut est l’aigle aux ailes déployées
(v. fig. 129), allégorie du pouvoir suprême, et bientôt après on aperçoit la tête
d’un griffon (symbole de la loyauté et du gardien fidèle qui est également
sculpté à diverses reprises et parfois avec l’aigle même à l’extérieur de l’édi
fice dans l’élégante frise terminale); sous quelques oiseaux aux allures pleines
de vie on remarque la belle tête d’un jeune homme vue de profil;, viennent
ensuite une tête de cheval, des volatiles, un lézard, et en bas trois amours
jouent de la musique ou s’agitent joyeux au-dessus d’un très riche vase avec
festons, d’où sort un épis mûr, et au milieu duquel est sculptée une tête juvé
nile couronnée, et avec la chevelure tombant en chaîne (v. fig. 130).
A cet ensemble on devine, à mon avis, l’idée de l’artiste de faire allu
sion aux vertus les plus élevées, en mettant d’ailleurs dans la perfection ce
concept en regard du fol orgueil exprimé dans la composition du côté opposé.
Passant maintenant à la dernière face et commençant par le bas on voit
la figure (restaurée dans le bras gauche) d’un jeune homme nu, avec un oeil
ouvert et l’autre fermé en signe de malice ou de demi-cécité, lequel supporte
à genoux un vase quelque peu aplati et pesant d’où sort une tige divisée en
plusieurs feuillages (v. fig. 132); vient ensuite une valve de coquillage (blen
nie on capa santa des Vénitiens) avec deux ailes déployées (dans les tombeaux
symbole d’immortalité, ailleurs encore de Vénus ou de l’amour). Sur un autre
vase avec aux côtés deux amours composés en forme de sirènes apparaissent
divers oiseaux qui s’excitent mutuellement. Vient ensuite une gracieuse dryade
avec les parties inférieures transformées en feuilles piquantes de chardon,
qui soutient une patère ou disque à écailles sur lequel deux satyres de sexe
différent tiennent des propos légers (v. fig. 131); le mâle a la tête couverte
d’une écaille de limaçon (animal employé même par les anciens comme at
tribut de la lubricité et déjà reconnu par eux pour hermaphrodite). La déco
ration se termine en haut par une orgueilleuse tête diabolique de la tête de
laquelle s’échappe une flamme dispersée par le vent et de l’extrémité des cor
nes pendent de petites fleurs en guise d’offrandes à une divinité.
A mon avis donc il n’est pas difficile et ce n’est pas tomber dans la
subtilité d’interpréter ces éléments qui concordent suffisamment, comme une
allusion au péché d’idolâtrie de la chair. Péché qui, d’après l’enseignement
catholique, réussit au démon, et auquel la jeunesse se laisse si facilement en
traîner. Et ici encore d’une façon suffisamment visible est établi un contraste