Full text: La renaissance (Seconde partie)

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SECONDE PARTIE 
de réfuter les opinions émises par plusieurs écrivains d’Art qui ont voulu 
s’occuper de nos monuments, parce que les documents que j’ai découverts 
me dispensaient d’attaquer leurs assertions pour les réduire à néant. Mais 
quand les documents font défaut (et ce n’est pas ma faute), je ne puis ni ne dois 
m’abstenir de passer au crible les appréciations ou inductions des autres, toutes 
les fois que celles-ci peuvent induire en erreur quiconque étudie l’Histoire. 
Ainsi si je regarde désormais comme inutile de réfuter l’hypothèse de 
tous les écrivains, d’après laquelle la Scuola de S. Marc serait l’œuvre de 
Martino père de Pietro Lombardo, je ne crois pas pouvoir me dispenser de 
combattre le sentiment de quelques-uns et d’après lequel l’architecte ou les 
chefs de cette confrérie auraient exécuté cette œuvre d’une façon si admirable 
grâce aux conseils et à l’ingérence de ce Francesco Colona frère prêcheur qui 
habitait le couvent voisin des Ss. Jean-et-Paul. Je veux dire l’auteur du fan 
tastique roman intitulé l’Ipnerotomachia di Potifilo où domine surtout avec 1’ a- 
mour de Polia un goût immodéré pour la Sainte Antiquité. 
Dans ce songe, Polifilo décrit arcs de triomphe, pyramides, places, ponts, 
thermes, amphithéâtres, palais, temples, rotondes, tombeaux, inscriptions, co 
lonnes, ruines, marbres rares polychromes, statues et bas-reliefs, mosaïques, 
peintures, évoquant en un mot toutes les formes qu’avait revêtues le génie 
Romain, en faisant le sujet de comparaisons d’anthropomorphisme, relevant cer 
taines consonnances entre l’architecture et la musique et tirant des préceptes 
et termes ou s’inspirant de Vitruve, tantôt mettant l’Alberti à contribution, 
tantôt enfin laissant libre cours à son imagination. 
Il ne faut pas croire cependant que ce livre, imprimé à Venise en 1499 
par les presses d’Aide Manuce et orné de nombreuses gravures, ait la valeur 
d’un traité de révélations ou découvertes artistiques ; car si Polifilo, sous le 
rapport littéraire et classique, s’élève, et non pas toujours, plus haut que ses 
contemporains, sur une foule d’autres points il ne dit rien qui n’ ait été de 
puis longtemps sanctionné par l’expérience et le goût du milieu, et par con 
séquent son œuvre ne fait que refléter les tendances ou les idées de son temps. 
Et certes, dans la Scuola de S. Marc déjà terminée avant le livre que 
nous rappelle Fra Colonna, je ne trouve aucune chose que l’auteur de l’arc 
de triomphe de S. Marie-des-Miracles n’ aurait su faire sans le conseil d’un 
homme qui n’avait jamais mis la main à un travail, et surtout dans cette 
Scuola qui comptait parmi ses membres des artistes tels que Bellini. 
L’intérieur de l’édifice, malgré les dégâts subis en beaucoup d’endroits 
quand il a été converti en hôpital, conserve encore assez bien son grandiose 
caractère original et spécialement dans la vaste salle supérieure et dans celle 
du rez-de-chaussée où l’on faisait au commencement de 1488 les fondations 
des colonnes qui la partagent si heureusement en forme de nefs. Sur les cha
	        
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