LA RENAISSANCE.
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Cependant telle est la différence de ces deux monuments trévisans qu’il y
a lieu de s’étonner qu’on ait voulu les attribuer à un même maître.
Puis, devant l’élégance raffinée des formes du tombeau Zanetti, on constate
encore un autre fait, à savoir que l’élément juvénil s’emploie déjà largement à
accélérer révolution de la Renaissance. Et Rizzo qui, suivant l’assertion de Gau-
rico, se rendait dans cette ville pour voir les travaux de Tullio et même très pro
bablement sur l’ordre des Onigo, dut certainement envier à Pietro Lombardo
l’harmonieux concours de ses fils, de maîtres aussi habiles que Tullio et Antonio.
A Carbonara près de Trévise, dans une villa qui appartenait, je crois, aux
Tiepolo et est aujourd’ hui la propriété des Passi, nous trouvons un demi-relief
(o m. 82 X o m. 52) représentant S te Claire (*) qui soutient 1’ enfant Jésus
endormi (v. fg. 138). Groupe composé avec beaucoup d’habileté, plein de grâce
et où il faut surtout admirer 1’ expression de douceur extatique peinte sur les
traits de la Sainte, de même que le fini du travail qui fait en quelque sorte
oublier l’erreur de proportions dans 1’ épaule droite de la Séraphique et la
forme des mains un peu trop pesantes.
Cette sculpture n’ est pas signée et nous n’ avons aucun document qui nous
donne le nom de l’auteur; néanmoins ceux pour qui le caractère d’une œuvre
tient lieu du reste, ceux qui comprennent le dessin, ne peuvent guère hésiter,
à mon avis, à 1’ assigner à Pietro Lombardo.
Risquée au contraire serait une conjecture sur la provenance de ce travail;
mais.parmi les si, les mais, les peut-être, on pourrait encore soupçonner qu’il
fut exécuté pour 1’ Eglise et le Monastère de Sainte-Claire de Trévise, élévée,
suivant le témoignage de Federici, par Venceslao Bressa sur le plan et sous la
direction de Lombardo.
Ailleurs qu’à Trévise on réclamait cependant les lumières et le concours
de ces maîtres et les écrivains padouans nous apprennent qu’ en 1490 Tullio
Lombardo, probablement aidé de son père, fournissait le plan de 1’Eglise de
Praglia (v. fig. 159) et peut-être encore de la cour du monastère.
On sait en outre que vers la fin du XV e siècle Pietro Lombardo travaillait
au couvent de S. Giustina à Padoue, mais si par suite des restaurations, des
reconstructions, des remaniements et enfin des dégâts et des déprédations qu’à
soufferts ce grandiose édifice, il n’est pas possible de préciser en quoi consi
staient les travaux de l’éminent artiste, la découverte de deux documents im
portants par l’illustre professeur Vittorio Lazzarini, Vice-Directeur du Musée
de cette ville, nous permet de dire qu’ au commencement de 1495 Lombardo
fut envoyé par la Seigneurie de Venise à ces religieux pour certains travaux de
lapidibus vivis duris, nécessaires au monastère et que les padouans ne pouvaient
ou ne savaient exécuter.
(*) Texte It., p. 231.