SECONDE PARTIE
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à doubles feuilles (v. fig. 180). Toutefois, dans le choix de ce type inférieur, on
surprend moins le goût délicat et vivant d’un maître de la Renaissance que
l’instinct d’imitation; et de plus la forme des volutes a quelque chose de lourd
et d’antipathique, et la forte inclinaison des bandes de l’architrave n’est guère
agréable. Dans la corniche qui s’ étend sous le frontispice on omit judicieuse
ment la cimaise, particularité, dont nous trouvons, du reste, parmi nous le
premier exemple dans le portail de l’Arsenal élevé en 1460 et qu’ on revoit
quelques années. après dans le portail de S. Michel-en-T Ile.
Dans 1’ autel Zen insignifiante est l’attitude des statues de S. Pierre et de
S. Jean-Baptiste et ignoble est la physionomie de ce dernier qui, même dans le
modelé des membres, laisse quelque peu à désirer.
Meilleure est la tête de l’autre Saint d’ailleurs assez bien drapé.
Quant à la statue de la Madone, dite la Vierge dellâ Scarpa ( ! ), travail
d’Antonio Lombardo, Burckhardt a pu l’appeler à juste raison une « pure con
ception de l’âge d’or de Giovanni Bellini », ajoutant que «l’enfant, assis sur
»le genou droit de la Vierge et faisant le geste de bénir, est d’une exquise
beauté ( 2 ) ».
Il faut remarquer en outre les gracieux anges (refoulés deux à deux), les
chérubins et la figure, si admirablement belle, expressive et modelée avec tant
de goût, du Père Eternel dans le ciel de 1’ autel. Figure qui accuse très net
tement une intimité artistique avec l’image en marbre représentant le même
sujet autrefois dans notre Eglise de S. Giuseppe et aujourd’ hui au Musée de
Berlin ( 3 ); aussi faut-il encore la classer parmi les travaux d’Antonio et non
plus de Tullio Lombardo qui, comme sculpteur, mérite une place moins élevée
dans l’Histoire de l’Art.
Dans le tombeau de Zeno (v. fig. 10), à 1’ exception du concept général
(emprunté, je l’ai dit, des monuments d’Orsato Giustinian et du Doge Tron,
œuvres d’Antonio Rizzo) et de la tête du Cardinal qui semble coulée d’après
nature, il y a vraiment peu de chose de bon à observer. Et dans les mouve
ments théâtraux et dans la forme maniérée et incorrecte des six statues des
Vertus autour du caisson, dont les ornements sont aussi exécutés avec peu de
grâce, nous avons déjà une preuve de la décadence du goût; c’en est fait dé
sormais de la Renaissance.
Temanza raconte que « vers le commencement du XVI siècle, « on voulait
» élever le grandiose édifice de la Scuola (nuova) délia Misericordia, laquelle
» est une des six grandes confréries de Venise. Le devoir de ceux qui l’admi-
» nistraient était de bâtir un édifice, qui rivalisât de magnificence avec les plus
» importants de la cité. Aussi Giovanni Fontana et Alessandro Leopardo, tous
0 2 3 ) Texte It., p. 246 et 247. . - A