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SECONDE PARTIE
sont rationnellement tenues indépendantes des entablements diviseurs qui, dans
beaucoup d’autres de nos édifices, jouent le rôle de parapets ou appuis.
Le motif des larges consoles supportant les jambages de ces fenêtres con
tribue à alléger la forme des ouvertures et à en rendre moins, raides ou mono
tones les récurrences horizontales.
D’ un côte, ce motif, souvent employé dans les autres villes de la Vénétie
mais rarement à Venise même, de l’autre, l’espèce de sphinx qui orne l’un
des grands chapiteaux angulaires de 1’ étage du milieu, me rappellent certaines
riches petites consoles à montants ou appuis que l’antiquaire Marcato achetait,
il y a quelques années, en Dalmatie (v. fig. 191 et 192), où l’on retrouve d’au
tres exemples caractéristiques de l’emploi de cette particularité (v. fig. 193).
L’indication de cette double analogie n’ est pas, à mon avis, chose tout
à fait superflue, car il y eut aussi d’excellents maîtres dalmates qui travaillè
rent dans les lagunes; tel était, je pense, ce Luca da Isola qui en 1476 et 1477
sculpta, de concert avec Giovanni Buora et Domenico Duca, les grands chapi
teaux avec aigles de 1’ Église de S. Zacharie, et tel était encore ce Luca di Pietro
de Cattaro, ornemaniste et architecte à ses heures, dont j’ai parlé à diverses
reprises.
Ce palais des Grimani ne figure pas sur la vue de Giacomo de’ Barbari
et sa construction due à une reconstruction, fut très probablement commencée
dans les premières années du XV e siècle.
Enfin relativement à la paternité artistique, il a été, sans aucune preuve ( l ),
attribué à un Lodovico Lombardo qui ne peut être le fils d’Antonio Solaro et
qui ne saurait, par 1’ absence de toute référence, être identifié avec Lodovico
dei Bossi dont j’ ai déjà parlé. D’ ailleurs, si non par le caractère de tous les
détails, du moins par son empreinte générale, ce palais doit être, plus que tout
autre, rangé parmi les édifices que 1’ on doit au génie des maîtres Lombards.
Comme je 1’ ai dit, les dernières œuvres de maître Giovanni furent le
Dortoir de S. Georges-Majeur et la petite façade dans la cour de la Scuola
de S. Jean-l’Évangéliste, dans lesquelles il fut aussi secondé par son fils
Andrea.
Giovanni Buora mourut en 1513, laissant deux fils Antonio et Andrea, et
était peut-être le père de Lucrezia Buora, épouse de Giovanni de Cazugo; tail
leur de pierres qui, le 25 Avril 1532, étant malade, dictait son testament faisant
mention d’elle et de son fils Michèle et désignant, parmi les exécuteurs de ses
dernières volontés Andrea Facinio prêtre à S. Samuel, beau-frère du susdit An
drea Buora.
A considérer le lieu choisi pour sa sépulture, on dirait, ce semble, qu’ap-
(*) Texte It., p. 257.