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SECONDE PARTIE
eaux fluviaies ; et même en 1488 on avait commencé les travaux l’un nouveau
canal, dit Bretone, fini sept ans après. Mais pour achever la diversion projetée,
d’autres travaux étaient nécessaires et ils se firent sous la surveillance de
l’ingénieur Alessio Aleardi bergamasque. En 1506, du reste, il restait encore
beaucoup à faire et c’est pour cela que fut consulté Fra Giocondo qui, après
étude sur place, présenta au Magistrat des Eaux quatre mémoires ou rapports
que combattirent Aleardi et autres.
Ces discussions durèrent jusqu’en 1507 ( d ) et enfin la Seigneurie y mit
un terme en ordonnant la continuation des travaux suivant le système en cours
et en confiant l’exécution à l’ingénieur bergamasque.
Mais pendant ce temps Cambrai était le théâtre de terribles menaces
contre Venise, de la part d-es princes étrangers et italiens et du Pape, et les
mesures prises ne purent faire tête à l’orage, car, le 14 Mai 1509, l’armée
vénitenne ayant été défaite à Agnadello, le territoire de la République se trouva
pour ainsi dire à la merci des Français victorieux.
Comme il avait été décidé, Jules II, Maximilien 1 er , empereur d’Alle
magne, Ferdinand le Catholique, François Gonzague et Alphonse duc de Fer-
rare entrèrent en scène à leur tour ; en présence d’un tel déploiement de
forces, on eût dit que la dernière heure allait sonner pour la malheureuse
Venise. Mais les ressources dont elle pouvait disposer, les grands sacrifices des
citoyens, 1’ habile politique, la valeur de ses Capitaines, se joignant au défaut
d’ entente qui paralysait les opérations militaires des ennemis, lui permirent
de conjurer un pareil désastre; et quoique gravement atteinte, elle put à la fin
se relever pour arborer de nouveau le glorieux étendard de S. Marc sur un
grand nombre de villes perdues.
Il est superflu de le dire ; au milieu de tant de vicissitudes, de la dé
tresse forcée du trésor et des charges des particuliers, les beaux-arts passèrent
au second plan, et la plupart des travaux demeurèrent interrompus pendant
un certain temps. Toute 1’ activité était concentrée au contraire dans les arse
naux, dans les fonderies, dans les forteresses ou les châteaux, où les architectes
et les ingénieurs au service de la République inventaient tous les moyens pos
sibles de résistance. Et parmi les maîtres qui surent au milieu de cette agitation
guerrière donner des preuves signalées de leur dévouement et de leur ingé
nieuse activité ( 2 ) figure au premier rang le vieux Frà Giocondo.
Dès le commencement de Mars 1509 il était à Crémone avec le capitaine
Latanzio de Bergame pour étudier les moyens de défense de cette place si
exposée.
Peu après, quand fut envahie la terre ferme en grande partie, on ordonna
de nouveaux puits ou citernes et la construction de moulins à blé à l’arsenal,
( 12 ) Texte It., p. 286.