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SECONDE PARTIE
sais s’il faut plus admirer 1’ élégance et la variété des ornements modelés avec
profonde connaissance du haut et bas relief des masses principales, ou l’effet
graduel des clairs-obscurs, ou encore la facture pleine de désinvolture et de
goût des détails en parfait rapport avec le point de vue ou distance de l’obser
vateur. Et la figure qui y est représentée avec petites têtes ailées ou chérubins
dans une grande variété d’attitudes et d’expressions, trahit souvent, outre
l’habileté de 1’ ouvrier, le sentiment d’ un véritable artiste ( v. PL 137
fig. 2).
Quoique traitées avec plus de relief et de décision et quoique souvent
encore un peu lourdes, toutefois Lune dans P autre je crois pouvoir aussi attri
buer aux mêmes maîtres les décorations des carrés ou petits caissons qui com
posent les douelles des archivoltes disposées sur ces chapiteaux pensiles.
Mais pour pouvoir juger de la qualité des divers éléments choisis par
Moro pour P exécution de son projet, il est nécessaire d’examiner les décors
des piédestaux qui supportent les grands pilastres ou parastes de la Chapelle
majeure. Ces décors, que la photographie a vulgarisés ( v. PI. 66) et dont une
foule de calques ont été prises sous toutes les formes, sont considérés avec
raison comme les plus importants modèles du genre, d’après lesquels celui qui
étudie P ornementation, peut non seulement se faire la main et s’ exercer l’œil
avec grand profit, mais encore affiner ou rehausser son propre goût.
Ces décors sont certainement surpassés pour le motif de la composition
et pour l’exubérante morbidesse (qu’on pourrait appeler charnue) de certains
détails, par certaines décorations de l’Eglise de S. Job, du Palais Ducal et de
P Oratoire de Sainte-Marie-des-Miracles ; mais celles-ci sont plus châtiées et plus
spontanées, et la frêle structure typique même des feuillages trahit toute une
végétation printanière.
Quant à 1’ auteur probable ou à 1’ atelier d’où sortirent ces ornements
et ceux qui embellissent la grande porte, j’ en parlerai plus loin car, avant de
passer en revue 1’ extérieur de P édifice, je dois m’ arrêter un moment sur l’une
des parties les plus caractéristiques et importantes de ce monument, c’est-à-dire
sur le Chœur pensile appelé autrefois barco ou pontile qui s’ étendant transver
salement aux trois nefs (K B M) détermine une espèce de vestibule destiné,
lui aussi, autrefois aux cérémonies religieuses (v. PI. 64).
Cette cloison a la façade tournée vers le couchant formée de cinq
arches séparées par des pieds-droits avec ailerons et sveltes colonnes en demi
relief avec piédestaux (v. PI. 64 fig. 1). Sur les gracieux et différents chapi
teaux de ces colonnes s’ avance en saillie et court un entablement proportionné
et profilé avec une rare élégance et enrichi d’une frise avec feuillages, cornes
d’abondance, oiseaux et autres ornements composés et distribués avec beaucoup
de netteté et sculptés avec tant de délicatesse de reliefs que l’œuvre du déco