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SECONDE PARTIE
d’ embarras en brisant les archivoltes; mais cet expédient indépendant et brutal,
si commun dans la période du baroque, ne pouvait certainement venir à l’esprit
d’un maître de la Renaissance, qui au contraire prolongea non seulement ces
corniches recourbées en les rattachant aux pilastres du corps central, mais qui
avec son propre goût, au lieu de les réduire uniquement en cimaise et gouttière
( qui pouvaient saillir d’autant), préféra encore leur donner 1’ allure de con
treforts.
C’ est ce que fit Moro même à S. Zacharie et ce qu’ il pratiqua à peu
de chose près à S. Jean-Chrysostôme.
Quelques années plus tard le constructeur de S. Félix ( v.fig. yr) voulant
éviter ce défaut essayait au contraire de résoudre le problème d’une manière
plus simple en supprimant absolument les corniches des petits frontispices.
Simplification encore tant soit peu discutable.
Relativement à 1’ ensemble de la façade de S. Michel on désirerait en
outre une entrée plus large. Il est bon d’ailleurs de remarquer que beaucoup
plus tard, lorsqu’ on pava la petite place qui se trouve devant l’Église, le niveau
du sol dut être rehaussé et on sacrifia ainsi 1’ un des gradins du palier circu
laire de la porte.
Et c’est dans cette entrée ( v. PI. 38) que la perfection et la grâce, qui
rendent si géniales les œuvres de la Renaissance, se manifestent surtout sous
une forme remarquable.
Proportions, modénatures et ornements, tout est ici combiné de la manière
la plus harmonique et, sauf une certaine gracilité de plusieurs parties, telles que
l’architrave et quelques modillons, 1’ artiste le plus exigeant y trouve bien peu
de chose à redire.
Et c’ est tant dans les riches chapiteaux que dans les gracieuses décora
tions de ces pilastres (v. PI. 63) que je retrouve la maîtresse main qui exé
cuta les susdits décors des piédestaux du presbyterium ( v. PL 66 ), eux aussi
comme la porte sculptés dans un calcaire tiré de la même carrière et bien
distinct de l’autre matériel istrien employé dans les autres parties de l’édifice.
Quel est, me demandera-t-on, l’auteur de ces sculptures?
Dans le passage de Moschini que j’ai rapporté ci-dessus il est dit que
Lorenzo de Venise « en 1470 exécuta la porte et les fenêtres de la façade »,
et à propos de l’assertion précitée de Sansovino il ajoute: « On voit par là
» 1’ erreur de Sansovino qui attribue cette facture à Ambrogio da Urbino. Peut-être
» qu’ était d’Urbin 1’ Ambrogio nommé peu après, que 1’ on trouve à 1’ année
» 1470 (*) ».
Lorenzo Seguso qui, dans une étude (remplie d’erreurs) sur les Lom-
bardo (*), voulut parler de cette Église, résumait comme il suit un document
( 12 ) Texte It., p. 171.