REFLEXIONS
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nique et de la saine Physique; elle est inadmissible ( 1 ). On doit donc
conclure que le maximum de puissance motrice résultant de l'emploi de
la vapeur est aussi le maximum de puissance motrice réalisable par
quelque moyen que ce soit. Nous donnerons, au reste, bientôt une
seconde démonstration plus rigoureuse de ce théorème. Celle-ci ne doit
être considérée que comme un aperçu [voir page t5).
On est en droit de nous faire, au sujet de la proposition qui vient
d’être énoncée, la question suivante : Quel est ici le sens du mot maxi
mum? A quel signe reconnaîtra-t-on que ce maximum est atteint?
A quel signe reconnaîtra-t-on si la vapeur est employée le plus avanta
geusement possible à la production de la puissance motrice?
Puisque tout rétablissement d’équilibre dans le calorique peut être
la cause de la production de la puissance motrice, tout rétablissement
d’équilibre qui se fera sans production de cette puissance devra être
considéré comme une véritable perte : or, pour peu qu’on y réflé
chisse, on s’apercevra que tout changement de température qui n’est
(‘) On objectera peut-être ici que le mouvement perpétuel, démontré impossible par les
seules actions mécaniques, ne l’est peut-être pas lorsqu’on emploie l’influence, soit de la cha
leur, soit de l’électricité; mais peut-on concevoir les phénomènes de la chaleur et de l’élec
tricité comme dus à autre chose qu’à des mouvements quelconques de corps, et comme tels
ne doivent-ils pas être soumis aux lois générales de la Mécanique? Ne sait-on pas d’ailleurs
à posteriori que toutes les tentatives faites pour produire le mouvement perpétuel, par quelque
moyen que ce soit, ont été infructueuses? que l’on n’est jamais parvenu à produire un mou
vement véritablement perpétuel, c’est-à-dire un mouvement qui se continuât toujours sans
altération dans les corps mis en œuvre pour le réaliser?
On a regardé quelquefois l’appareil électromoteur (la pile deVolta) comme capable de
produire le mouvement perpétuel ; on a cherché à réaliser cette idée en construisant des
piles ¿échos, prétendues inaltérables; mais, quoi que l’on ait pu faire, l’appareil a toujours
éprouvé des détériorations sensibles lorsque son action a été soutenue pendant un certain
temps avec quelque énergie.
L’acception générale et philosophique des mots mouvement perpétuel doit comprendre,
non pas seulement un mouvement susceptible de se prolonger indéfiniment après une pre
mière impulsion reçue, mais l’action d’un appareil, d’un assemblage quelconque, capable de
créer la puissance motrice en quantité illimitée, capable de tirer successivement du repos
tous les corps de la nature, s’ils s’y trouvaient plongés, de détruire en eux le principe de
l’inertie, capable enfin de puiser en lui-même les forces nécessaires pour mouvoir l’univers
tout entier, pour prolonger, pour accélérer incessamment son mouvement. Telle serait une
véritable création de puissance motrice. Si elle était possible, il serait inutile de chercher
dans les courants d’eau et d’air, dans les combustibles, cette puissance motrice; nous en au
rions à notre disposition une source intarissable où nous pourrions puiser à volonté.