RÉFLEXIONS
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(l’un corps à l’autre, il faut, dans le premier un excès de température;
mais cet excès peut être supposé aussi petit qu’on le voudra; on peut
le regarder comme nul en théorie, sans que pour cela les raisonnements
perdent rien de leur exactitude.
On peut faire à notre démonstration une objection plus réelle, que
voici :
Lorsque l’on emprunte du calorique au corps A pour donner nais
sance à de la vapeur, et que cette vapeur est ensuite condensée par son
contact avec le corps B, l’eau employée à la former, et que l’on sup
posait d’abord a la température du corps A, se trouve, à la fin de l’opé
ration, à la température du corps B; elle s’est refroidie. Si l’on veut
recommencer une opération semblable à la première, si l’on veut déve
lopper une nouvelle quantité de puissance motrice avec le même in
strument, avec la même vapeur, il faut d’abord rétablir les choses dans
leur état primitif, il faut rendre à l’eau le degré de température qu’elle
avait d’abord. Cela peut se faire sans doute en la remettant immédiate
ment en contact avec le corps A; mais il y a alors contact entre des
corps de températures diverses et perte de puissance motrice (’) : il
deviendrait impossible d’exécuter l’opération inverse, c’est-'a-dire de
faire retourner au corps A le calorique employé à élever la tempéra
ture du liquide.
Cette difficulté peut être levée en supposant la différence de tempé
rature entre le corps A et le corps B infiniment petite; la quantité de
chaleur nécessaire pour reporter le liquide à sa température première
sera aussi infiniment petite et négligeable relativement à celle qui est
nécessaire pour donner naissance à la vapeur, quantité toujours finie.
La proposition, se trouvant d’ailleurs démontrée pour le cas où la
(') Ce genre de perte se rencontre dans toutes les machines à vapeur. En effet, l’eau des
tinée à alimenter la chaudière est toujours plus froide que l’eau qui y est déjà contenue; il
se fait entre elles un rétablissement inutile d’équilibre dans le calorique. On se convaincra
aisément à posteriori que ce rétablissement d’équilibre entraîne une perte de puissance mo
trice, si l’on réfléchit qu’il eût été possible d’échauffer préalablement l’eau d’alimentation en
l’employant comme eau de condensation dans une petite machine accessoire, où l’on eût fait
usage de la vapeur tirée de la grande chaudière, et où la condensation se fût opérée à une
température intermédiaire entre celle de la chaudière et celle du condenseur principal. La
force produite par la petite machine n’eût coûté aucune dépense de chaleur, puisque toute
celle qui eût été employée serait rentrée dans la chaudière avec l’eau de condensation.