Full text: Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance

NOTICE BIOGRAPHIQUE 
7 s 
« Tou frère est né au milieu des soucis et des agitations de la gran 
deur, toi dans le calme d’une obscure retraite, m’a dit souvent cette 
excellente mère; votre constitution à chacun se ressent de cette diffé 
rence d’origine. » 
Mon frère, en effet, était de complexion délicate: il se raffermit plus 
tard par des exercices de corps très-variés et judicieusement combinés. 
Il était de taille moyenne, doué d’une extrême sensibilité et en même 
temps d’une extrême énergie, plus que réservé, presque sauvage, mais 
singulièrement hardi dans l’occasion. Lorsqu’il croyait lutter contre 
l’injustice, rien ne le retenait. Pourquoi ne pas raconter une anecdote 
qui nous le montre sous cet aspect dès l’enfance? 
Le Directoire avait fait place au Consulat. Carnot, après deux ans d’exil, 
rentré dans sa patrie, fut appelé au Ministère de la Guerre. Bonaparte, 
en ce temps, ménageait encore les républicains; il se rappelait que 
Carnot avait protégé ses débuts dans la carrière militaire, et il conti 
nuait les relations d’intimité qui avaient régné entre eux pendant le 
Directoire. Quand le Ministre se rendait à la Malmaison pour travailler 
avec le premier Consul, il emmenait souvent son fils, âgé d’environ 
quatre ans, et celui-ci demeurait auprès de M me Bonaparte, qui l’avait 
en grande affection. 
Cette dernière, un jour, et quelques autres dames étaient montées 
dans une petite nacelle et la dirigeaient elles-mêmes sur un étang. 
Bonaparte survient, s’amuse à ramasser des pierres et à les jeter autour 
de la nacelle, de manière à faire jaillir de l’eau sur les fraîches toilettes 
des batelières. Celles-ci n’osent pas manifester tout haut leur déplaisir. 
Le petit garçon, après avoir observé quelque temps ce manège, vient 
tout à coup se poser crânement devant le vainqueur de Marengo, et le 
menaçant du poing: « Animal de premier Consul, crie-t-il, veux-tu ne 
pas taquiner ces dames ! » 
Bonaparte, à cette apostrophe inattendue, s’arrête, regarde tout 
étonné l’enfant, puis il est pris d’un fou rire qui gagne tous les specta 
teurs de la scène. 
Une autre fois, au moment où le Ministre, voulant retourner à Paris, 
cherchait son fils, confié à M me Bonaparte, celle-ci s’aperçut qu’il lui 
avait échappé. On le trouva fort loin, dans un moulin, s’en faisant 
expliquer le mécanisme. Ce désir le préoccupait depuis plusieurs jours ;
	        
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