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nantes pour tel autre, la photographie en noir et blanc est déjà, bien que loin encore de la carte
finale, sur le chemin du graphisme.
- on oublie trop souvent, particulièrement dans la photographie à grande échelle, le
grave inconvénient que présentent les photographies prises dans l'infra-rouge pour le rendu des
ombres, essentiellement éclairées par la lumière diffusée par l'atmosphère, lumière dont les
radiations sont presque entièrement absorbées par le filtre utilisé à la prise de vues ; ce phéno
mène est plus marqué sur les photographies IR en noir et blanc, généralement obtenues avec un
filtre rouge plus ou moins sombre que sur les photographies en fausses couleurs, Ektachrome
Infra-red comme Spectrozonales, prises avec un filtre orange. Et pourtant, même dans ce cas,
il n'est que de contempler un négatif pour voir combien les ombres, alors blanches, sont tota
lement dénuées de détails (8).
Cette allusion au négatif nous amène à la constatation d'une tendance qui semble de plus
en plus générale, à savoir l'emploi, tant en couleurs naturelles qu'en fausses couleurs, du pro
cessus négatif-positif même avec des films fabriqués pour être inversés (9). On se réserve la
possibilité d'une intervention au laboratoire, par filtres correcteurs et on obtient généralement
ainsi, outre des couleurs plus exactes, des contrastes de luminance meilleurs, appréciés de la
plupart des utilisateurs.
Cette intervention du laboratoire doit être menée par des opérateurs ayant une idée ex
acte des couleurs du terrain photographié. Pourvu qu'il soit attentif et trichromate normal, le
photographe se tirera bien de sa tâche lorsqu'il s'agira de rendre les couleurs naturelles.
Il n'en ira pas de même avec les émulsions "fausses couleurs", employées en négatif-
positif. Le photographe de laboratoire peut jouer à l'envi de filtres colorés : on s'en donne à
coeur joie avec un nouveau jouet . Les photo-interprètes ont sans doute vu là, non sans raison,
une gamme étendue de possibilités, permettant de distordre le spectre dans tel ou tel domaine,
plus particulièrement intéressant en vue d'une recherche donnée. Mais n'est-il pas permis d'y
voir un danger ? Si chacun adopte sa filtration propre, ou toute une série de filtrations qui lui
soit particulière, les échanges d'information d'un chercheur à l'autre, notamment par la voie
des revues spécialisées, ne vont-ils pas s'en trouver rendus très difficiles ? Ce risque me pa
raît d'autant plus grand que des filtrations en apparence très voisines (qu'on regarde par trans
parence la superposition des écrans ou qu'on établisse la courbe de transmission de l'ensemble
résultant de leur empilage), donnent des résultats extrêmement différents (10). Lorsque l'em
ploi des émulsions "fausses couleurs" en photo-interprétation aura pris une extension suffisante
(8) Signalons que certains photo-interprètes, tels M. Clos-Arceduc, aiment à étudier la végétation sur les négatifs en
fausse couleur, justement parce que, pour les zones situées dans la pénombre, on n'est pas gêné par celle-ci : on per
çoit bien mieux les détails sur le négatif léger que sur le tirage papier très dense.
(9) Voir par ex : P. G. Mott "Some aspects of colour aerial photography in practice and its application". The Photogram-
metric Record. Vol. V. № 28 Oct. 1966, pp. 221 à 239. Rappelons, outre celle qui vient d'être donnée, quelques référen
ces fondamentales (du point de vue de la commission I plus que de la commission VII) concernant la photographie aérienne
en couleurs naturelles et en fausses couleurs :
- R. G. Tarkington et A. L. Sorem. "Color and False-Color Films for aerial Photography". Photogrammetric Engineering,
vol. XXIX n° 1. Janvier 1963 pp. 88 à 95.
- V. Y. Mikhailov : "The Use of Colour Sensitive Films in Aerial Photography in U. S. S. R. " Photogrammetria. vol. XVII.
1960-1961. 3. pp. 99 à 104.
- F. L. Corten : "Physik des Luftbildes in "richtigen" und "falschen" Farben". Bildmessung und Luftbildwesen. Fascicule
4. 34ème année. Décembre 1966. pp. 191 à 291.
Les lecteurs qui n'entendraient que le français pourront se reporter à :
- J. Cruset "Emulsions pour la couleur, sensibles dans l'infrarouge et destinées à la photographie aérienne". Communi
cation au 85ème congrès de l'Association française pour l'avancement des Sciences (juillet 1966). Revue générale des
Sciences. Tome LXXIV. n° 3-4. mars-avril 1967. pp. 71 à 76.
(10) Qu'il me suffise ici de citer le cas concret que voici : un tirage en négatif-positif d'une Ektachrome Infrared Aero
donnait avec une très légère filtration orange, conseillée par le fabricant (filtres Agfa : jaune 30, magenta 30) un aspect
presque monochrome de couleur abricot. Tiré avec un filtre beaucoup plus dense, à peu près de même dominante orange
(jaune : 210, magenta : 200), ce cliché a donné des tons allant du bleu pâle pour les champs au pourpre rouge pour les fo
rêts ; avec une filtration apparemment peu différente (jaune : 210, magenta : 230), ces mêmes objets vont du bleu tur
quoise au pourpre roux, tandis qu'une association de filtres présentant une dominante également orangée (jaune : 200,
magenta : 280) donne des positifs allant du bleu-vert au jaune moutarde foncé (fig.3).