188 LES MERVEILLES DE LA GRAVURE.
habile, bien que dans quelques piéces on re-
trouve encore des maigreurs dans les extrémités,
et des pieds immenses supportant de petites figu-
res, il inventa et grava des compositions d'une bien
autre importance. Le Portement de Croix, eslampe
justement célébre, qui eut l'honneur d'étre connue
de Raphaél et de ne pas lui paraitre indigne d'étre
étudiée; la Tentation de saint Antoine, que Michel-
Ange copia, sil’onen croit, du moins, une ancienne
‘tradition, et Saint Paul frappé sur le chemin de Da-
mas, sont des œuvres qui n’ont guère leur équiva-
lent dans toute l’école allemande. En outre de
ces planches dont la réputation est aussi bien éta-
blie que légitime, l’œuvre de Martin Schongauer
est plein de pièces admirables ; dans une planche
de dimension restreinte, l’Annonciation, l’artiste a
su donner à la Vierge une physionomie douce et
tendre qui se rapproche de la beauté, et la tête de
l'envoyé céleste possède une grâce qui n’est pas
sans quelque affinité avec l’art milanais. Dans la
Fuite en Egypte, le chef d’œuvre, suivant nous, de
Martin Schongauer, la Vierge entourant le divin en-
fant de ses bras, passe, montée sur un âne, sous
un palmier couvert d’anges ; saint Joseph cueille
à l'arbre quelques dattes. Cette ingénieuse com-
position est encore relevée par le sentiment de
bonheur de la Vierge, pressant contre son sein ce
fils soustrait à la colère d’Hérode et adoré par
des anges. C’est dans les sujets tendres que les ar-