294 LES MERVEILLES DE LA GRAVURE.
D'aprés ses premiéres planches, on voit que Mi-
chel Lasne s'inspira d'abord de gravures étran-
gères au lieu de chercher simplement ses modèles
autour de lui. Mal lui en prit. François Villamène
et les Sadeler exercèrent sur lui une regrettable
influence ; ce fut assez tard, et non sans peine,
qu'il parvint à se débarrasser de ce qu’il leur de-
vait, et qu’il accusa enfin sa personnalité. C’est
vers 1650 — sa première estampe porte la date
de 1617 — qu’il adopta la manière sobre de croi-
ser les tailles et d’accuser la physionomie qui lui
a valu une place si distinguée dans l’école fran-
çaise. Ses portraits de cette nouvelle période, ceux
de Pierre Séguier et de Pierre de Marcassus, d’a-
près D. Dumonstier, de Strozzi, d’après Simon
Vouet, de Brunyer et d’Évrard Jabach, d'après
Van Dyk, se font remarquer par une fermeté
d'outil et une entente de la physionomie que bien
peu d'artistes francais ont égalées. La conscience
dans l'interprétation n'en a point non plus exclu
la volonté ni le caractère. Par malheur, à la fin de
sa carrière, Michel Lasne dévia de la bonne route.
Le succès de Claude Mellan le troubla ; il résolut
d'imiter cet artiste, et c'est alors qu'il s'appliqua
à espacer ses tailles autant que possible, au delà
du raisonnable, et préoccupé surtout de la ma-
nœuvre, pour employer une expression consacrée,
il sacrifia le dessin au futile avantage de montrer
son savoir. Dans cette fácheuse entreprise sombra