508 LES MERVEILLES DE LA GRAVURE.
exprimé avec autant de vérité l'impression de la na-
ture. Quel charme! quelle sincérité ! La pointe a
rendu avec la même grâce facile la transparence
de l’eau, la solidité des constructions, la sou-
plesse du feuillage agité par le vent ; l’air circule
partout, enveloppe tout ; peu soucieux de la taille
uniforme, du contour net, l'artiste a gravé comme
il eût peint. Ce sont des tons qu'il superpose en
les dégradant et qu'il met à leur vraie place; la
nature qu'il a devant lui et qu'il voit avec ses yeux
et son àme de poéte fait le reste. En aucun temps
le paysage ne fut traité avec cette ampleur naive,
cette majesté sereine; et, qu'on le considére
comme graveur ou comme peintre, Claude le
Lorrain doit étre estimé le plus grand paysagiste
qui ait jamais existé.
Claude Gellée apparaît comme une exception
dans l’école française. A peine eut-il quelques
imitateurs, encore ceux-ci restèrent-ils bien loin de
leur maitre. C'est que, du reste, les regards étaient
tournés de l’autre côté, et les graveurs préféraient
reproduire les œuvres d’un peintre de figures
alors fort en vogue, de Simon Vouet. Pendant sa
jeunesse, cet artiste avait beaucoup voyagé en An-
gleterre, en Turquie et en Italie, et, de retour en
France, sa réputation s'était promptement établie,
se répandant jusqu'à la cour, à ce point que
Louis XIII voulut recevoir des lecons de dessin
d'un maitre si renommé. On pense bien qu'une