94 LES MERVEILLES DE LA GRAVURE.
Quelque prépondérante que füt l'influence d'An-
dré Mantegna sur les graveurs du nord de l'Italie,
quelle qu'ait été l'autorité. de son enseignement,
]a vigueur de sa doctrine, à cóté de son école il se
forma cependant un groupe d'artistes pour qui
l'art tout entier résidait à Venise. Le maitre de
leur choix, de leur amour, était l’illustre Giovanni
Bellini, et quand par hasard ils s'aventuraient à
regarder les fresques de Mantegna chez les Eremi-
tani de Padoue ou dans le palais des Gonzague,
oubli d’un instant, faiblesse momentanée, ils re-
venaient bien vite témoigner par leurs travaux de
l'admiration exclusive et. constante dont les rem-
plissaient les peintures de Jean Bellin, du Titien
et de Giorgion. Heureuse la ville qui suffit à toute
une légion d'artistes de talent ! Heureux, les gra-
veurs qui trouvent dans les œuvres contempo-
raines de magnifiques modèles à reproduire sous
les yeux mêmes de ceux qui les ont créés ! Mais
est-ce à dire que les graveurs Vénitiens ne puisé-
rent jamais en eux-mêmes les compositions qu'ils
mirent sur le métal, qu'ils eurent toujours recours
à linspiration et aux dessins d'autrui? Assuré-
ment non. S'il ressort de chacun de leurs ouvrages
une influence commune, néanmoins lorsqu'on
examine les planches de Mocelto, de Jules et Do-
minique Campagnola, de Benedetto Montagna, ou
de Jacques de Barbari, il n'est pas possible de
croire que ces artistes se soient toujours astreints